«C'est partie pour le premier jour de l'Inferno Festival»
STEPHANE MASSON Journaliste
Festival
17/04/2025
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Report Inferno Metal Festival : Jour 1 par Denis Lagrange
Nous sommes jeudi, premier jour du festival Inferno à Oslo. La pluie fine a repris, par intermittence, mais reste très supportable étant donné la proximité des lieux entre eux. Pour récupérer le bracelet du festival avec nos accréditations, ça se passe à l’angle du Rockefeller, à partir de 15h30. Oui, mais les concerts dans les petites salles débutent à 14h. Vous ne comprenez pas pourquoi ? Si ça peut vous rassurer, nous non plus. Le festival commence donc à 16h15 pour nous, avec Dodheimsgard (avec un « o » barré). On les avait loupés au Beyond the Gates l’an dernier à cause d’une pizza très hypée qui avait pris BEAUCOUP de temps, donc on tâche d’être à l’heure cette fois.
Notre bracelet au poignet, on se dirige immédiatement vers l’entrée des festivaliers pour le Rockefeller complex. On y arrive vers 15h40, on a donc un peu d’avance et on fait un petit tour du propriétaire afin de se repérer. Une partie de la rue devant le complex a été clôturée pour constituer comme une cour d’entrée. Là, on trouve un food truck qui sert des burgers et des frites, et un stand qui propose des mini-pizzas et du café, mais qui n’est pas encore monté.
Les entrées des deux salles (Rockefeller et John Dee) sont presque côte-à-côte dans cette cour improvisée, mais la grande salle est fermée au public pour l’instant. On rentre donc par la porte qui indique « John Dee » et on tombe très vite sur un bar. Il faut bien tester, donc ce sera une bière pression pour moi et un cidre en bouteille pour madame. Bon, on ne testera pas trop, parce que l’addition s’élève déjà à 297NOK (24€75). Comme prévu, John Dee est une salle relativement petite, elle est toute en largeur avec quelques piliers. La zone derrière la console est surélevée et le mur du fond est presque entièrement doté d’une banquette appréciable. On s’apercevra vite qu’il y a des bars un peu partout, avec cette particularité qu’on a déjà observé l’an dernier à Bergen, que sont les gobelets et carafes d’eau en libre-service un peu partout. C’est sain, ça désengorge les bars et ça ne doit pas coûter grand-chose à l’orga, bref un truc qu’on aimerait bien voir dans les salles de concert parisiennes.
On ressort pour attendre l’ouverture de l’autre salle et là on constate la queue au niveau de la fouille à l’entrée du festival. Quelques minutes plus tôt, on n’a pas du tout attendu, mais maintenant, la file d’attente semble remonter une bonne partie de la rue. Ne pas hésiter à venir un peu en avance, donc, surtout si on veut voir le premier groupe. Un peu après 16h, la grande salle ouvre effectivement et on s’engouffre en même temps que les festivaliers déjà présents. En entrant, sur la gauche, un petit market, avec notamment un stand « metalheads against bullying » (MAB) et quelques stands tattoo et illustrateurs. Le temps d’en faire un tour très rapide et les premières notes de Dodheimsgard retentissent. On se fraie donc un chemin jusqu’à la fosse où on trouve assez facilement un emplacement d’où on voit bien.
Je ne vais pas prétendre bien connaître le groupe, mais c’est très plaisant à écouter. Assez atmosphérique, mais très pêchu. On aura même droit à un featuring de Kvohst, ancien chanteur du groupe, avec une très belle présence scénique. Le set est assez long pour un premier groupe de festival, mais on ne s’en plaint pas. Il semblerait qu’ils aient joué des morceaux d’un peu toutes les époques (on parle quand même d’un groupe qui a plus de trente ans d’histoire), mais je ne suis pas la personne à solliciter si vous voulez une setlist exhaustive.
Le groupe suivant au programme, c’est Syn. On les a déjà vu au Beyond the Gates l’an dernier et j’en ai gardé un bon souvenir, mais il nous reste des endroits à explorer, aussi décidons-nous de rater les premières notes. La salle Rockefeller Music-Hall comporte un premier et un second balcon et nous montons étudier les possibilités pour les futurs concerts. De ce second balcon, on peut accéder à un rooftop. Celui-ci sert d’espace fumeur et comporte deux stands de nourriture qui proposent des burgers. Tiens, on n’en a pas déjà vu quelque part ? Mais ceux-ci pourraient bien être à la viande d’élan, si on a bien compris. À confirmer plus tard.
On redescend pour s’apercevoir que de l’autre côté de la fosse, se trouve le merch des groupes et du fest, où sont agglutinés plusieurs dizaines de festivaliers (ça parait peu comparé à un Hellfest, mais il faut se souvenir qu’on est sur des échelles différentes, l’Inferno, c’est environ deux mille festivaliers). On ne sait pas quels stocks ils ont prévu et on ne voudrait pas repartir brocouilles, donc on fait la queue avec les autres pour acheter notre petit t-shirt Inferno (girlie pour madame et longsleeve pour moi). On a aussi quelques stands ici, des fringues metal, de la sauce pimentée, des savons au motif de corpse paint et un stand de gaufres et hot-dog (qui ne sont pas mutuellement exclusifs, on verra très vite quelqu’un manger un hot-dog fait à partir d’une gaufre). Le temps de faire tout ça et il est presque l’heure du set de Necrophobic. Tant pis pour Syn, mais de toute façon, on avait déjà loupé la plus grosse partie de leur set.
Ce qui m’amène à une petite parenthèse sur l’organisation du festival et plus particulièrement au running order. En effet, ce dernier mentionne les horaires de début de chacun des sets du festival (jusque-là c’est normal, me direz-vous), mais aucune durée ou horaire de fin. On se retrouve donc à devoir deviner un peu ce qu’il en est et ça complique un peu l’établissement de notre programme en amont. Il me faudra presque trois jours pour m’apercevoir que pour les deux scènes principales, l’horaire de début de l’une correspond à chaque fois à l’horaire de fin de l’autre. C’est simple et je reconnais que je suis à la ramasse, mais ça pourrait être plus explicite (d’autant qu’on ne peut pas se fier à ça pour les petites scènes où il n’y a pas d’alternance). Fin de la parenthèse.
Les Suédois de Necrophobic nous délivrent un death assez mélodique teinté de black très sympa. Ils ont une bonne énergie sur scène, même si, personnellement, je n’accroche pas plus que ça. On les quitte donc au bout d’une petite demi-heure, pour aller jeter un œil et une oreille à Udad (avec un rond au-dessus du « a »). En effet, si je ne les ai jamais vus, j’en ai entendu parler, il s’agit du nouveau projet de Thomas Eriksen, de Mork. Je ne regrette pas mon choix. Pendant près de trois quarts d’heure, on se prend un peu un mur de son en pleine face, c’est calme et torturé, froid et pourtant vivant et agressif à la fois. C’est une description succincte, pas très cohérente, mais il est très difficile de mettre des mots dessus. En tout cas, je recommande chaleureusement l’écoute.
On sort juste quelques minutes avant la fin pour aller commander un burger-frites à l’entrée, qui s’avère correct. On trouve quand même que le nombre de tables où se poser est un peu chiche et on a de la chance de dénicher un coin où poser notre barquette pendant qu’on dévore le burger.
Pas le temps de souffler, Tiamat s’apprête à jouer sur la grande scène. Tout en restant dans le côté obscur de la force, on s’éloigne ici du black metal et on verse clairement dans le goth. Ça n’est pas pour déplaire à madame et je dois avouer que les sonorités sont sympas. La salle commence à être un peu bondée à cette heure-ci et il devient plus difficile de trouver un bon emplacement. On finira par trouver un coin à l’angle du deuxième balcon qui permet une vue correcte sur la scène tout en ayant un bon son. Ce n’est pas parfait, mais on s’en contente. Les Suédois (oui, nous sommes sur une large dominante scandinave quant à l’origine des groupes) se montrent très heureux d’être là et nous gratifient de mélanges de cornes et de cœurs avec les doigts. C’est très mignon et ça donne au moins le ton de ce qu’ils racontent entre les morceaux. Oui, parce que jusqu’ici, même les Suédois parlent en norvégien (enfin on imagine) et on n’y comprend pas grand-chose.
À la fin du set, la salle se vide nettement, sans doute en partie car il commence à être l’heure de dîner (et il est même un peu tard pour ça chez les Norvégiens), mais aussi car Spectral Wound joue sur la John Dee. Bon, nous préférons nous placer correctement pour Batushka, qui sont les prochains à jouer ici. On dégote assez facilement une paire de chaises au deuxième rang du balcon et on attend les Polonais.
C’est la première fois que je les vois depuis la scission du groupe après le tout premier album « Litourgiya ». Celle-ci s’est suivi d’un important épisode conflictuel où les deux formations résultantes se sont battues pour garder le nom de Batushka. Une juridiction a depuis tranché et autorisé son créateur Krzysztof 'Derph' Drabikowski à utiliser le nom. Pour éviter les confusions, l’autre formation se renomme « Patriarkh » à compter du premier janvier 2025, mais a tout de même décidé de faire appel. C’est donc le seul et unique Batushka que l’on voyait aujourd’hui. Force est de constater que la qualité est toujours au rendez-vous. On assiste réellement à une messe orthodoxe dans toute sa sacralité, avec une déco très au point, mêlant bougies et icônes. Les costumes des huit membres du groupe servent bien la scénographie, anonymisant les musiciens tout en leur conférant une forme d’aura cléricale. On saluera également le cercueil fermé qui sert de pièce centrale, surmontée d’une photo hommage de Jan-Martin Jensen, fondateur du festival qui est décédé en février de cette année. Après avoir reçu de plein fouet la puissance de la liturgie alliée à la violence du black metal, la messe s’achève dans un decrescendo apaisant, durant lequel Derph reste un peu sur scène pour souffler les bougies restantes, puis descend dans le pit photo pour saluer et remercier les fans (sans sortir de son personnage, bien sûr). En tout cas, on note que les Polonais sont à l’aise ici, car ils sont tous pieds nus sur scène.
Pour la suite, les dilemmes commencent. Je ne connais pas Violent Magic Orchestra, mais la description du black metal des Japonais m’a donné envie d’aller voir du côté de Goldie pour voir ce que ça donne. Au final, pourtant, on se rabattra sur la valeur sûre de In the Woods…, un bon post black que l’on a déjà pu apprécier lors de l’évènement 25 ans de Garmonbozia à Rennes et qui ne nous laisse pas de marbre. D’ailleurs les Norvégiens se produisent à petit bain, ce 26 avril à Paris en première partie de Saor. Si vous lisez ces lignes avant cette date, je vous recommande le concert ! Sans surprise, on passe un très bon moment et le groupe aussi semble-t-il. In the woods, c’est un peu la bande dépareillée de copains du lycée, avec entre vingt et trente ans de plus. Visuellement, il n’y a pas trop d’unité, mais l’alchimie se fait pourtant. Je ne vois pas le temps passer que le set se termine déjà et il est 23h30, l’heure pour l’un des papas du genre de nous faire son show pour clôturer ce premier jour.
Je parle bien sûr de Abbath (Abbath Doom Occulta de son nom de scène complet). Ça ne fait pas partie de mes écoutes récurrentes, mais il faut bien admettre que l’on tient là l’un des piliers du genre. Le front man ne semble pas avoir pris une ride (malgré sa mine renfrognée quasi-permanente, on se demande comment il fait) et occupe la scène de long en large, sans répit. Ses mouvements sont un véritable gimmick et même sans être fan inconditionnel, la prestation donne un sourire inversement proportionnel au corpse paint du chanteur. Après ça, on rentre tranquillement à notre hôtel. Le temps de prendre une petite douche bien méritée et de commencer à écrire le présent article, il est trois heures du matin et on s’écroule sur l’oreiller.