Pour son neuvième album, Insomnium a choisi de nous raconter un fragment de l'histoire de la Finlande. Le groupe nous replonge dans les ténèbres du XVIIe siècle marqué par les superstitions, la paranoïa, la chasse aux sorcières, des famines épouvantables, des cas de cannibalisme, etc. Un chiffre glaçant reste en tête : 30% de la population finlandaise a été tuée entre 1696 et 1697. Le groupe rend par ailleurs hommage au roman "La Fiancée du loup" (1992) de l'écrivaine finlandaise Aino Kallas.

Les plus de six minutes de '1696' qui ouvrent cet album nous accueillent avec une rythmique lancinante et une mélodie brodée par des guitares acoustiques. Lentement, l'emprise du groupe s'installe et nous renouons avec leur puissance évocatrice. Des voix gutturales finissent par compléter ce rituel qui introduit avec brio ce nouvel opus. Voici ensuite l'excellente 'White Christ', dévoilée depuis quelques temps déjà et qui est en fait un featuring avec Sakis Tolis, le chanteur et guitariste rythmique de Rotting Christ. La superbe et saisissante voix cristalline de Johanna Kurkela fait son apparition sur 'Godforsaken'. Avec une intensité qui n'a rien à envier à Amalie Bruun de Myrkur ou à Eivor Palsdottir d'Eivor, elle apporte une grâce éthérée à la composition. Sa voix vous est d'ailleurs peut être familière puisqu'elle a collaboré avec Sonata Arctica pour "The Days of Grays" (2009) ou encore avec Tuomas Holopainen de Nightwish pour son album solo "The Life and Times of Scrooge" (2014).

Bien que 'Lilian' parle d'une jeune femme, telle une apparition spectrale et envoûtante, aucune voix féminine ne répond au scream de Niilo Sevänen. Les guitares de Markus Vanhala, Ville Friman et Jani Liimatainen se répondent et brossent un impressionnant paysage musical qui s'anime sous nos yeux pour un titre qui condense l'esprit du Melodic Death Metal d'Insomnium. Plus longue, 'Starless Paths' est une chanson nuancée et riche qui permet à chaque musicien de briller par sa technicité et son engagement émotionnel. Des voix claires répondent au scream du frontman et bassiste sur 'The Witch Hunter' qui donne vraiment l'impression que le groupe nous raconte une histoire. Cette volonté semble de plus en plus ancrée dans le projet global d'Insomnium, en témoignent les livres qui accompagnent leurs dernières sorties.

Après ces aventures, ces découvertes et ces récits enflammés, Insomnium fait le judicieux choix d'inviter l'auditeur à s'apaiser au son de 'The Unrest'. Doux et calme, ce morceau poétique nous berce et nous permet de respirer avant de replonger dans l'enchantement qu'est cet "Anno 1696". Cet interlude se révèle en fait doublement bénéfique tant 'The Rapids' nous emporte à un rythme effréné imposé par la batterie de Markus Hirvonen et par des guitares à la mélodie endiablée ! Puissante et majestueuse, la composition et ses touches orchestrales assure à ce nouvel album une conclusion digne de ce nom et parfaitement à la hauteur de l'ensemble de l'oeuvre.

"Anno 1696" est un excellent album dont Insomnium a toutes les raisons d'être fier ! Si on connaissait la beauté de leur musique et sa capacité à nous émouvoir, on a plaisir à découvrir de plus en plus les talents de conteurs des musiciens qui délivrent avec talent des récits aboutis et sensibles auxquels leur musique confère l'ampleur méritée.