«« Queen of Time », un album audacieux et extrêmement riche qui permet à Amorphis de nous prouver une nouvelle fois sa capacité à composer des chansons complexes, intelligentes et sensibles»
Amorphis est un groupe finlandais aujourd'hui légendaire, formé en 1990. Avec déjà une douzaine d'albums studios à son actif, le groupe doit faire fort avec « Queen of Time », mais connaissant leur exigence et leur créativité, je ne m'inquiète pas pour eux !
Vous avez sans doute déjà la mélodie presque orientalisante qui ouvre « The Bee » puisque la chanson est disponible depuis quelques temps déjà. Un clavier s'y superpose pour un effet de majesté des plus réussis avec lequel contraste le scream, profond et puissant. Tomi Joutsen mène le groupe d'une main de maître, en particulier à travers de très belles accalmies en chant clair. Les lignes musicales se répondent et s'alimentent les unes les autres, par moment dominées par une voix féminine aérienne et vibrante d'émotion. Passés les trois premières minutes, on retrouve une composition bien plus Heavy/Prog qui allège l'atmosphère sombre qui s'était créée. On passe à quelque chose de plus épique et qui laisse davantage de places aux riffs de guitare avec « Message in the Amber ». Les passages chantés se font sur une ligne rythmique assurée par une batterie discrète ainsi que quelques notes de basse. Deux ambiances très distinctes s'effleurent dans ce titre, résolument plus dansant que le précédent. Les morceaux de cet album sont relativement longs et le groupe prend le temps de créer des ambiances, empilant mélodies sur mélodies afin de nourrir une créativité surprenante. Le travail sur les choeurs vocaux est tout simplement saisissant ! Les guitares d'Esa Holopainen et Tomi Koivusaari mènent la danse sur « « Daughter of Hate » ; mais la composition met également en avant la basse qui accompagne le chant clair doux et extrêmement fort dans sa portée émotionnelle. Les passages plus lourds de la chanson, véritables spirales infernales, sont suivis de saxophone, un détail suffisamment appréciable pour être souligné.
« The Golden Elk » est un morceau qui s'ouvre à travers une mélodie fantomatique et évanescente avant qu'une ligne de guitare prenne le dessus grâce à une composition relativement classique. La touche orientale qu'on devinait sur le premier morceau de cet album fait son grand retour, en particulier avec les parties vocales. L'influence de groupes comme Dream Theater est ici plus que palpable mais Amorphis continue de marquer de sa patte ses créations. Le titre se complexifie au fur et à mesure du temps, rajoutant de nouveaux détails musicaux qui finissent par s'assembler en une immense chaîne mouvante et dansante. Le ton est bien plus enlevé sur « Wrong Direction », qui conserve toujours des passages en apparence plus calmes. Néanmoins, la batterie de Jan Rechberger reste toujours extrêmement présente et maintient une certaine tension qui fait avancer toute la chanson. Vocalement, le chanteur nous propose quelque chose de plus sobre mais tout aussi construit que sur les autres titres. Cette retenue est plaisante car elle permet aux musiciens d'occuper le premier plan en offrant un morceau plus délicat. Le déferlement musical est total avec « Heart of the Giant », qui semble très prometteur mélodiquement, si je me fie à l'association guitares et clavier, jusque là parfaitement maîtrisée. Le scream fait son grand retour pour apporter une touche de brutalité à ce morceau, qui ne manque pourtant pas de mordant ! Le jeu rythmique qui se met en place renforce le côté entraînant de la chanson.
On découvre une ambiance presque celte avec « We Accursed ». Une nouvelle fois, Amorphis nous surprend par la richesse de ses influences et la diversité de ses productions musicales. Cette ouverture presque Folk n'avait cependant visiblement pour vocation que celle d'être reprise ponctuellement, sans constituer le coeur du morceau, finalement assez traditionnel et qui renoue avec un scream énergique. « Grain of Sand » nous propose un riff de guitare qui ne me convainc pas totalement mais Olli-Pekka Laine, à la basse, finit par instituer une ligne rythmique entraînante. Le titre n'est cependant pas le meilleur de ce nouvel album tant il reste linéaire et parfois fade. Passons vite à « Amongst Stars », un morceau dévoilé très récemment par le biais d'un clip. Je vous laisse le découvrir par vous-mêmes mais la collaboration d'Anneke van Giersbergen apporte un vrai plus au morceau qui vaut le détour ! Et on finit en beauté avec le flamboyant « Pyres on the Coast », entre scream grave et tendu et ligne musicale tantôt minimaliste, tantôt lumineuse et explosive. La chanson aurait presque pu être une version instrumentale tant la composition se suffit à elle-même dans son intelligence.
« Queen of Time » est un album audacieux et extrêmement riche. Amorphis témoigne encore de sa capacité à se renouveler en proposant des chansons complexes, intelligentes et surtout sensibles. La technicité ne fait pas tout mais l'engagement du groupe est complet et leur permet de nous offrir un album d'une grande qualité.