WARFATHER
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Death Metal

The Grey Eminence
Anibal BERITH
Journaliste

WARFATHER

«Warfather signe un album très abouti. On ne se lasse pas de l’écouter et bien que les compositions soient longues pour le genre, ça passe sans encombre de par leur caractère varié au rythme changeant sans cesse et de façon soutenue.»

9 titres
Death Metal
Durée: 51 mn
Sortie le 16/09/2016
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La bande à Steve Tucker nous revient en force avec un second album produit par le maître du brutal death mondial, j’ai nommé Erik Rutan. C’est la première collaboration des deux musiciens depuis l’époque Morbid Angel avec « Gateways To Annihilation » dont on ne peut s’empêcher de retrouver la patte et l’influence du groupe floridien en stand-by actuellement.

Accompagné d’Avgvstvs à la basse et en back-voice, Bryan Bever à la batterie et Jake Kock à la seconde guitare, c’est avec un line-up tout frais que « The Grey Eminence » a été enregistré au propre studio d’Erik Rutan, le Mana Recording Studio, succédant ainsi au moyen « Orchestrating The Apocalypse » à la production imparfaite et au son peu mis en valeur.

Fan de Morbid Angel, je suis très impatient d’écouter cet album, chose que je fais sans attendre pour vous en délivrer mes impressions.

Pour un disque du genre, le format est long avec 51 minutes répartis sur 9 titres, c’est dire qu’il y a de la matière dans chacune des compositions de Tucker, le Maître du jeu.
Dès les premiers riffs, l’influence de Morbid Angel est claire et cet album aurait très bien pu succéder à la discographie des floridiens tant l’univers est proche ; cependant, il se démarque par la brutalité qu’il dégage au-delà du côté malsain omniprésent tout au long de la galette.

Bouton play, place à ‘Orders Of The Horde’ et ce son de guitare si caractéristique connu depuis le cultissime « Covenant » de Morbid Angel. Oui, vous allez me dire que je fais trop de comparatif avec le groupe légendaire de Death Metal, mais le seul défaut que je pourrai faire à cet album, c’est justement son univers trop proche de ce dernier et Tucker n’arrive pas imposer un style qui lui est propre car l’influence morbid angelienne plane sans cesse.

En revanche, c’est bien plus brutal et c’est certainement sous les directives de Rutan qui, quant à lui, officie dans un univers bien plus brutal et malsain avec Hate Eternal.

C’est ainsi, que d’entrée de jeu, le premier titre de plus de 6 minutes entraine l’auditeur dans un univers à la fois brutal, sombre, inquiétant et pesant tout en dissonance et en contre rythme avec un tempo en sans cesse changement. Bien sur le timbre de Tucker est reconnaissable entre mille ce qui fait que l’amalgame avec son autre groupe ne peut être éviter.

Cependant, les compositions sont plus complexes avec un son plus résonnant et volumineux et l’intégration de larsen à la Obituary enfonçe le clou du Mal. Une belle entrée en matière que ce titre qui découle tout naturellement sur ‘Headless Men Can No Longer Speak’ à l’intro lourde et rapidement plus brutale. On monte d’un cran et ce sera la marque de fabrique de Warfather où chaque titre se succédant dépasse ainsi les limites avec cette notion du toujours plus, tout en préservant la qualité artistique et technique de la création.

On retrouve de toute évidence la dissonance, les riffs incisifs un peu plus torturés. Le growl plus caverneux du frontman confère immédiatement l’atmosphère dérangeante de la chanson à laquelle s’ajoute des soli plus dissonants les uns que les autres. Bryan le batteur fait preuve de génie tant le rythme qu’il impose est soutenu et que de façon générale, et ce sur tout l’album, la rythmique semble à contre temps et pourtant l’ensemble sonne bien.

L’outro brutale permet d’enchainer avec le plus direct ‘Judgement, The Hammer’ qui sur mid tempo propose le chant immédiatement sous les premiers coups de médiator. Point d’intro donc, l’américain embarque l’auditeur sans lui laisser de souffle pour récupérer bien que la première moitié du titre est plus aérienne, plus légère. Seulement quelques instants car le rythme s’accélère sur la seconde moitié pour ne plus lâcher vos tympans tant les blasts sont soutenus voire très rapides par la technique du blast beat. Tucker opte pour un chant plus éraillé si bien que l’ambiance jusque-là malsaine vire au démoniaque.

A ce stade de l’album, c’est la rupture. Comme je vous le précisai plus avant, chaque titre dépasse l’autre. C’est dans cet esprit que l’on prend ‘For Glory Or Infamy’ en pleine face. Il est clair que le quartet passe à la vitesse supérieure en proposant une chanson puissante et volumineuse. L’immersion est directe et sans concession, le growl de Tucker dégouline de terreur, les riffs sont impactants tout comme les blasts et plus on avance, plus l’auditeur sombre avec la mélodie toujours plus inquiétante au fil des secondes sur fond de blast mitraillés à la structure militaire.

Point de répit chères âmes perdues, ‘The Dawning Inquisition’ en remet une couche. Laissant plus de part aux plans instrumentaux, les guitares toujours mises en avant, l’atmosphère se veut plus monstrueuse, traine en longueur sans lasser et nous prépare au pesant ‘Heedless Servant’ plus gras et toujours aussi vibrant. On renoue avec l'univers démoniaque découvert plus avant, le matraquage des blasts en plus.

S’enchainent les deux titres les plus longs de la galette, les deux pièces maîtresses de l’œuvre.

‘Carnage Of The Pious’ est le plus varié des deux et je dirai même de l’ensemble de l’album. Warfather embarque ses fans dans son univers sordide à coup de riffs taillants comme des bistouris et un chant se rapprochant de celui de Tardy d’Obituary. Un esprit guerrier et conquérant se dévoile au fil des notes et le batteur a vite fait de vous tordre dans tous les sens tant le rythme imposé est soutenu et changeant. Une grande place accordée aux guitares, la composition pourrait ne pas en finir tellement elle est envoûtante et pénétrante.

Le titre éponyme, tout aussi long offre un registre plus glauque et torturé de par le caractère incantatoire des paroles. Plus on entre dans la chanson, plus les riffs se multiplient, plus l’obscurité se densifie. La mélodie dégagée est ténébreuse et prend beaucoup de place mais en laisse au dernier morceau de « The Grey Eminence », ‘Fair And Final Warning’ avec une mélodie plus simple et plus lancinante sous un rythme évolutif et soutenu avec une touche épique bien que sombre en outro.

Warfather signe là un album très abouti très au-delà de leur premier essai et c’est tant mieux. On ne se lasse pas de l’écouter et bien que les compositions soient longues pour le genre, ça passe sans encombre de par leur caractère varié au rythme sans cesse changeant et soutenu. Seul regret, Tucker a du mal à se défaire de l’univers musical de Morbid Angel si bien que l’on pourrait presque dire que Warfather est l’anti-chambre du groupe floridien. Cependant, foncez tête baissée, « The Grey Eminence » est de très haut niveau tant techniquement que musicalement et avec Rutan aux commandes, le son est exceptionnel.

Anibal Berith