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Unleashing The Beast

Chozo Tull
Journaliste

Justify Rebellion

Un album qui baigne dans le heavy à l'ancienne mais qui peine à se libérer du carcan de ses influences.
11 titres
Heavy - Thrash Metal
Durée : 54
Sorti le 19/01/2018
11282 vues
Un spectre hante le heavy metal : le spectre des années 80. Une décennie qui a forgé les codes du genre avec intensité et sincérité, et qui a pavé la voie à de nombreuses formations, qui, même de nos jours, trouvent dans les bibles successives de Maiden, Metallica et autres Kreator une source d'inspiration inépuisable. Justify Rebellion est de celles-ci. Le groupe sort ce mois-ci son premier album, « Unleashing the Beast », plein de rage et d'envie d'en découdre. Allez hop, c'est parti.

Dès l'intro de « Animal », le ton est donné : Justify Rebellion donne dans le tradi de chez tradi, que ce soit dans les riffs (répétés dans ce morceau d'ouverture jusqu'à plus soif), que dans les arrangements, avec une guitare clean qui enchaîne sur de la grosse disto. Metallica, « Battery » avez-vous dit ? Vous n'auriez pas entièrement tort, et ça ne sera pas là le dernier emprunt. Il faut le dire tout net : pour apprécier Justify Rebellion, il faut apprécier le metal à l'ancienne, et ne pas rechigner devant le recyclage permanent des idées qui ont précédées nos jeunes loups. Le groove de « Bloodcurdling Wail », vu et revu, « Relentless War » et ses faux airs de « For Whom The Bells Toll », le riff en palm mute de « Ancient Pharaoh » (ou celui de « Fight Bleed Kill ») style « Painkiller » et consorts, le repompage de « Seek and Destroy » dans « Beast », et j'en passe …

Sans faire la liste de tous les clichés metal que Justify Rebellion réemploie ici (d'ailleurs, ne soyons pas naïfs, ils sont loin d'être les seuls à se livrer à l'exercice !), l'auditeur de « Unleashing the Beast » ne peut faire l'impasse sur cette surabondance d'influences classiques qui ont trouvé leur place dans le jeu de notre quatuor danois. A partir de là, ça passe ou ça casse : soit vous êtes là pour célébrer avec eux l'héritage du genre (ça doit d'ailleurs bien passer live en festival), soit vous passez votre chemin en quête d'un peu de nouveauté. A noter que le disque est plutôt bien mixé : les guitares sont tranchantes, la basse est audible, et même si les toms de la batterie peuvent sonner un peu médiévaux par moments, ça a aussi son charme old-school. Les morceaux savent parfois être efficaces, même si l'on s'attend régulièrement à entendre un YEAH-EAAAAAAAH de Hetfield, particulièrement dans « Stuck up in Chains ». Bonus : le break de ce morceau a beau être convenu, il passe bien, avec ses guitares harmonisées et son rythme accrocheur. Le « Get away from me ! » de « Get Away » est énervé et presque punk, tranche avec le reste du CD, plus attendu. Mention spéciale pour le dernier morceau du disque, « The Core ». Avec son tempo lent et presque six minutes au compteur, il montre une facette un tant soit peu différente du groupe, qui pourrait faire pire que de l'exploiter plus avant. Dommage pour ce fade-out rapide sur un motif de guitare assez ordinaire, surtout après plus de cinquante minutes de musique - il est clair qu'une dizaine de minutes en moins sur ce disque aurait permis à Justify Rebellion de condenser leur propos sans réellement perdre en substance.

Si la section rythmique tient globalement la route et rebat tous ces sentiers battus avec entrain, la guitare solo pèche néanmoins par manque de technique et d'originalité – la plupart des plans sur le disque sont bien connus des amateurs de heavy/thrash, et l'usage de la wah ne fait que renforcer cette impression d'écouter un Kirk Hammett de poche. A la voix, Lukas Rautenberg offre une performance honorable, puissante, même si quelque peu monotone. Plus dans le registre gruff américain que dans les notes hautes d'un Dickinson ou d'un Halford, il donne à l'ensemble du disque une urgence bienvenue.

Vous l'aurez compris, Justify Rebellion peine à marquer son territoire sonore en misant trop sur ses influences, et c'est à l'auditeur de décider jusqu'où il a envie de suivre le groupe dans cette démarche. Il manque encore au quatuor un peu de maturité et d'expérience - ils n'auraient rien à perdre à prendre plus de risques musicaux. Cela étant dit, il s'agit également d'un premier disque, et il y a fort à parier qu'après quelques dates ces jeunes gens réussiront à creuser leur personnalité artistique.

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