We Are One (ft. Das Musikkorps der Bundeswehr)
Fred H
Journaliste

U.D.O.

«U.D.O. sort clairement ici de sa zone de confort. Si ce « We Are One » n’est pas sans défauts, saluons tout de même cette réelle prise de risques à s’aventurer dans des terres beaucoup moins familières qu’à l’accoutumée. »

15 titres
Heavy Metal
Durée: 75' mn
Sortie le 17/07/2020
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Deux ans après un « Steelfactory » de bonne facture, Udo Dirkschneider (ex-vous savez quoi) revient en (très grande) force avec un « We Are One » pour le moins surprenant. Pour son dix-septième opus studio de son U.D.O. (en 33 piges), notre teuton a choisi de bousculer son petit monde. Sur ses productions, le caractère très conservateur et sans compromis du monsieur est notoire (en gros, on respecte les codes du genre Heavy-metal et pas ou peu d’évolution ou d’intégration de nouveaux éléments dans la zique).

Dans le cas présent, l’allemand a décidé de (re)collaborer avec le Musikkorps der Bundeswehr (fanfare militaire des forces armées fédérales allemandes comprenant soixante membres). Notre vieux briscard et l'orchestre se connaissent plutôt bien et ont déjà plusieurs fois œuvrer conjointement par le passé (l’album live du Navy Metal Night 2014, l'édition 2015 du Wacken et le Military Metal-Night d’Elspe 2018). Plutôt que de proposer des titres déjà parus et « simplement » revisités façon orchestrale, Udo & cie ont souhaiter livrer des chansons (quinze) inédites. Pour l'écriture et les arrangements des morceaux, le sieur Dirkschneider a bossé avec le lieutenant-colonel Christoph Scheibling (l’homme à la baguette de ladite formation symphonique germanique) et les compositeurs des Forces armées allemandes Guido Rennert et Alexander Reuber. Les fidèles acolytes Peter Baltes et Stefan Kaufmann (tous deux ex-Accept) ont également prêtés leurs concours à cette vaste entreprise. Un effort 100% collaboratif en somme.

Ceci étant dit, que faut-il penser de cette énième association (après Deep Purple, Kiss, Metallica, ...) entre un groupe de Hard rock et une formation « classique » ? Déjà, au niveau des textes, l’équipe ratisse large avec des sujets contemporains comme le réchauffement climatique, les mouvements de réfugiés à travers le monde, la protection de l'environnement, le rejet de la montée de l’extrême-droite teutonne ou bien encore un hommage à leur pays réunifié depuis trois décennies.

Musicalement, l’ensemble donne surtout dans le mi-tempo. Du coté des arrangements, l’assemblée de musicos y va franco dans l’opulence et la grandiloquence. Il n’y a que les peureux qui ont peur parait-il. Cela manque parfois un peu de subtilité (le "j’y vais avec mes gros sabots" 'Rebel Town'). Il faut reconnaître que par moments cela part un peu dans tous les sens. Une touche de saxophone par ci ('Neon Diamond' exécuté en duo par Manuela Markewitz et Udo), une intro à la cornemuse par-là ('Beyond Gravity'), un chœur d’enfants ('Children Of The World'), une chorale plus massive (l’épique 'Love And Sin') ou bien encore des cuivres et chant rappé (et oui, il ne nous a pas trop habitué à ça le garçon) de pépère Udo ('Here We Go Again'). Peut-être est-ce un rien trop ambitieux ou trop en un seul disque ? Notre maître à penser de ce grand barnum n’a t-il pas été dépassé ? Lors de plusieurs plages, il est carrément absent (les semi-instrumentales 'Blackout', 'Natural Forces', 'Beyond Good And Evil'). Sur une plage, il se fait remplacer par sa compatriote miss Markewitz (la ballade ratée 'Blindfold (The Last Defender)'). Malgré tout, dans ce maelstrom de Heavy (power) metal orchestral, demeure quelques sympathiques propositions aux travers de refrains fédérateurs (la piste éponyme) et de belles mélodies (l’accrocheur 'Mother Earth').

Afin de ne tout de même pas trop décontenancer/perdre ses partisans, Udo à saupoudrer ici et là quelques ingrédients éprouvés (comprenez des riffs à l'ancienne et soli de grattes tranchants) de son heavy metal made in Deutschland (le speed métallique 'We Strike Back', l’efficace 'Pandemonium'). Le binôme Baltes et Kaufmann n’est assurément pas étranger à ces apports. Comme on ne se refait pas, notre hurleur laisse jaillir par instant sa voix aiguë, éraillée et rageuse si reconnaissable ('Future Is The Reason Why').

A soixante-huit balais, avec plus de cinq décades de carrière au compteur, le natif de Wuppertal sort clairement ici de sa zone de confort. Si ce « We Are One » n’est pas sans défauts, saluons tout de même cette réelle prise de risques à s’aventurer dans des terres beaucoup moins familières qu’à l’accoutumée.