Vous vous souvenez de Woodstock? Bon, avant que d’aucuns ne s’excitent en prenant votre serviteur pour un doux-dingue,précisons illico qu’on ne parle évidemment pas du mythique festival en lui-même. Celui-ci ayant eu lieu en 1969, la plupart d’entre vous n’ont pas été en mesure d’assister à ce grand raout hippie, qui procédait, avec du recul, du plus immense des amateurismes, nous faisant par là prendre conscience qu’il ne saurait y avoir d’autres éditions. La tentative effectuée en 1999 attesta brillamment de cette évidence, mais là n’est pas le propos de la présente chronique.
Lorsque votre serviteur évoque ledit festoche -lequel, pour rappel, eut en fait lieu dans une pâture à Bethel, un patelin situé à plusieurs kilomètres – il s’agit de faire référence au documentaire de Michael Wadleigh sorti en 1970. Plus particulièrement, le film s’ouvre sur un titre de Crosby, Stills and Nash, « Wooden Ships » qui souffle dès l’entame les relents de l’atmosphère de l’époque. A coups d’orgue baigné de cabine Leslie, de basse feutrée, de beats de batterie organiques, le trio nous transporte dans les champs du père Max Yasgur, où longtemps flottèrent les effluves de l’herbe qui fait rire et de l’acide lysergique.
Vous me direz « Quel rapport ? ». Et bien le fait est que l’album qui nous intéresse présentement réussit le tour de force de nous rappeler à cette ambiance musicale.
Car c’est ni plus ni moins à un voyage temporel que le trio danois « The Sonic Dawn » nous invite ici. Restituant la matière sonore de l’époque, les néo-hippies retrouvent les accents de l’écriture d’artistes comme les Cosby, Stills and Nash précédemment cités (l’introductif et ironiquement nommé « 21st Century Blues »), mais également les Doors, (« Dreams of Change », avec ses instruments gorgés d’UniVibe, ses envolées psyché d’orgue Hammond, et ses nappes hypnotiques de guitare acoustique, évoquant en pointillé « Riders on the Storm »), ou le Grateful Dead. C’est bluffant de fidélité, à tel point que le pékin non-averti serait tenté de penser être tombé sur une pépite déterrée dans un vieux studio abandonné depuis les années du « Flower Power ». Les dix plages de la galette (on frôle le space cake, pour le coup…) transpirent la coolitude « peace and love », esquissant parfois un pas de côté vers une expression plus jazzy et classieuse (« Transatlantique », parfait pour assister à un coucher de soleil sur une plage, ou son successeur « Scorpio »…on n’a jamais fait mieux depuis le Fender Rhodes, niveau clavier)
De fait, l’on oscille entre applaudir la performance (on n’est jamais allé aussi loin dans l’art du pastiche) et presque regretter ne pas être né à l’époque de ce bouillonnement musical. Alors parfois, l’on est un tantinet lassé de la chose. Il y a un côté parfois monotone lié au caractère exclusif de la musique proposée. Ne cherchez pas la diversité dans la présente œuvre : hors l’Acid Rock, point de salut.
Mais au final, on ressort de l’écoute en se disant : « Putain, c’était quand même quelque chose, la jeunesse de Pépé et Mémé! ». Recommandable !