Alestorm, poursuivant sa croisière dans un monde festif et de second degré, nous apporte un album correct, véritable thérapie permettant de vous ramener le sourire sur les lèvres.
En l'an de grâce 2017, après nous avoir jeté en pâture, deux sympathiques single, nos adorables Ecossais nous sortent un 5ème album.
Alestorm est un groupe qui a très vite été capable d'attirer le respect en raison d'un grand capital de sympathie.
Passionnés de « piratologie », voilà déjà 10 ans, sous le nom de « tempête de bière », qu'ils arpentent les mers du Power Folk, histoire de nous compter quelques aventures bien épiques.
Dans ce registre bien particulier, campant solidement sur sa ligne directrice de l'humble mais efficace créativité, Alestorm est symboliquement parvenu à se hisser sur le fabuleux 300 tonneaux, « Queen Anne's Revenge », légendaire bateau de Barbe-Noire, doté de 26 canons. Après quelques raids rondement menés, nos Scots sont parvenus à s'ancrer dans la scène de l'élite du monde du Folk.
A mon sens, 2 clés principales portent les fruits de ce beau succès ; primo, une jovialité énorme qui se dégage de leur univers musical alors que la piraterie était loin d'être une oeuvre de bisounours et secundo, un frontman sortant de l'ordinaire, Christopher Bowes, unique survivant des assauts du passé. S'il ne devait en rester qu'un, ce serait lui. Et tel fut le cas.
Dans ce tableau trop élogieux que je dresse, il apparaît aussi quelques ombrages…et notamment une frange de public qui n'accroche pas du tout au millième degré d'Alestorm, trouvant les compositions trop basiques, trop simplistes et ne supportant pas le fantasque. Il y en aura toujours qui seront là avec de hautes attentes qu'il sera toujours bien possible de combler avec d'autres ambassadeurs plus proches de leurs aspirations. Sans vouloirs les blâmer, je pense que même dans la scène Black, il existe quelques puristes capables de sortir de leurs critères rigoureux pour savourer quelques bons moments festifs sur un Finntroll, par exemple.
Bref, le capitaine Bowes est toujours à la barre, accompagné de deux autres vétérans, le bassiste Gareth et le batteur Peter Alcorn.
Autre cheville ouvrière des flibustiers, le quartier-maître Elliot Vernon, prodige du clavier déjanté.
Enfin, la plus jeune recrue, ni manchote, ni unijambiste, le guitariste Hongrois, Maté Bodor.
En avant, partons à l'aventure en toute allégresse !!!
A quoi nous attendre avec ce nouvel opus ?
Serait-il aussi chouette que le bien ficelé « Sunset on the Golden Age » qui m'avait presqu'enchanté ?
Ce « pas de tombe mais la mer », titre évoquant la titanesque prévalence de l'aspiration à la liberté sur la réalité de finitude.
Comment voguer dans les eaux libertaires ?
Toujours sous l'égide de la fête, de la joie transcendée par la ripaille, nos pirates nous offrent un voyage dans la félicité.
Le titre éponyme démarre en trombe dans un espace bien épique, sur base du chant rauque habituel.
Les claviers commencent dans la sobriété pour ensuite se lâcher dans une essence lumineuse.
Les instruments à cuivre viennent renforcer les balises du morceau. Le jeu de guitare de Maté est entraînant. La batterie assure.
C'est sans doute un peu « kitsch » mais si je pense à Bal Sagoth, je trouve que c'est vachement bien foutu. On y trouve les ingrédients utiles.
« To the End of the World » reprendra le même chemin avec une petite âme Celtique. Bon sang, on s'imagine sur la table en bois, la mousse de la pinte dégoulinant du verre, imprégnant nos guenilles.
S'ensuit Mexico » qui ouvre sur une ambiance électro pop, rappelant les premiers jeux d'ordinateur et leur musique assez typée. Nous embarquons pour Mexico, épargnant ainsi le coût très onéreux du billet d'avion. Et puis, par bateau, on aura sans doute une chance de croiser les dauphins. Sans vouloir amenuiser le pouvoir de rêve de ce morceau, je ressens ici plus de lien avec les références belges « Stellla » plutôt qu'avec le creuset Folk testimonial.
Sur « Alestorm », nous retrouvons le single offert cette même année, flanqué d'un chant hardcore (serait-ce ce bon Elliot ?) qui ne dérange nullement l'ensemble mais ce n'est pas neuf en soi. On penserait même avoir en guest « Fear Factory » participant à un « sympatical Kombat ».
A ce stade, on perçoit l'homogénéité de l'opus, fonçant là où ça fait du grand bien.
Sur « Bar ünd Imbiss », dès les premières lignes de chant, nous pourrions croire que nous allons nous enfoncer dans une aire introspective, plus sérieuse mais c'est sans compter sur le caractère atypique de Messire Bowes. Il nous flingue les psychorigidités, et ma foi, c'est tant mieux.
« Fucked with an Anchor » passerait à merveille en soirée de mariage, juste avant le départ des amoureux pour….aller s'effondrer, meurtris par le stress et gonflés par les agapes maritales. Nous restons en pleine lumière de vie.
Le très mordant « Pegleg Potion » offre une belle perspective guitaristique qui ponctue l'élan d'énergie. Ce n'est plus tourner la tête que l'atmosphère amène comme effet mais bien de vous souffler dans une spirale de légèreté. Le chant se brutalise encore pour renforcer la pression du bras de fer vocal. La pression est là, amenant des forces centrifuges plus que centripètes.
« Man the Pumps », tout en gardant une haute cadence, dans son rendu, nous apparaît presque pareil à un slow endiablé. Sans doute le morceau le plus sage de l'album, amenant une certaine altitude. Serions-nous sur le fameux « Hollandais volant » ?
S'ensuit « Rage of the Pentahook » qui nous garde la part belle à un folk correct, appuyé par un riifing de guitare sonnant un peu Death mélodique Suédois pour ensuite s'inscrire en harmonie avec le fond populaire.
L'album se termine sur « Treasure Island », revisitant ainsi par l'allégorie, un tout grand classique pour une durée agréable de 8 minutes. La quadrature épique est toujours au rendez-vous, le choeur s'en donne à coeur joie. Le second degré transpire sans spécialement lasser l'audition.
En conclusion, ce « No Grave But the Sea » présente des hymnes corrects et entraînants. Je ne pense pas que ce soit le meilleur album d'Alestorm mais cela reste tout à fait dans la norme du monde du Folk. Et surtout, ce qui est produit là sent la capacité à lâcher prise sans chercher à séduire quiconque.
Nos Ecossais font ce qu'ils aiment, sans se prendre au sérieux et il serait dommageable de leur reprocher.
Cet album sera parfait pour vous ramener le soleil dans l'âme lorsqu'en été, il pleuvra.