Le power trio le plus psyché de l'hexagone vient tout juste de nous faire parvenir depuis une galaxie lointaine, très lointaine sa nouvelle transmission "Ilion".
Actif et très productif, Slift est relativement discret lors de la sortie de ses deux premiers albums mais avec la sortie de "Ummon" en 2020, le groupe explose les charts ! Il se retrouve propulsé en tête des charts bandcamp et s'est très vite positionné comme un incontournable des sorties de 2020 mais plus largement comme un nouveau classique du genre. Pour la faire courte, j'ai découvert Slift avec "Ummon" et comme énormément de gens, j'ai été charmé, hypnotisé par la musique du trio. "Ummon" est un immense album qui dépasse largement sa niche musicale et qui est magnifiquement illustré par les visuels de la bande dessinée "L'oiseau Poussière" de Philippe Caza, auteur qui a notamment publié dans la cultissime revue Metal Hurlant. "Ummon" fut tellement remarqué, que pour la sortie de "Ilion", Slift a signé chez Sub Pop, label mythique qui a vu passer dans ses rangs Nirvana notamment.
Pour ce nouvel album, Slift n’a pas perdu de son ambition ! En effet, “Ilion” dépasse largement l’heure d’écoute (1h19 précisément) avec des morceaux tournant autour des dix minutes. C’est un album extrêmement riche musicalement et dense en influences.
L’album s’ouvre sur les chapeaux de roues avec le titre éponyme. Nous sommes instantanément projeté dans cet immense espace, où chaque vibrations et sons résonne magnifiquement. Ce premier morceau est une véritable invitation à un voyage cosmique des plus mémorables. Les guitares sont habitées, la batterie frénétique, la basse hypnotisante et le chant est complètement possédé. Nous naviguons au fil des morceaux, des cassures de rythmes, des passages de frénésie totale ou d’un calme et d’une légèreté apaisante. Sur les trois premiers morceaux “Ilion”, “Nimh” et “The Words That Have Never Been Heard”, Slift fait se qu’il sait faire de mieux, des morceaux fleuve chargés en émotions et d’une intensité rare. Si je devais qualifier la musique de Slift, majestueux est le premier adjectif qui me vient en tête. Slift joue une musique organique, vivante, poignante. Elle nous attrape et nous fais vivre une expérience sensorielle et émotionnelle sans pareille. Ce moment flottant sur “Ilion” où seul le chant est notre unique repère dans cet infini fonctionne à merveille ou bien ce “Mother, Mother, Mother,…” hurlé à tout rompre donne une dimension supplémentaire au morceau “Nimh”
“Confluence” vient quelque peu calmer le jeu et nous embarque dans des strates plus mélancoliques avec ce saxophone lointain et errant. Avec ce saxophone qui renforce le côté jazz du morceau, je suis obligé de penser à Blade Runner et sa son iconique OST signée Vangelis. Nous planons au gré de ces notes de saxophone tel Deckard (Harrison Ford) s’interrogeant sur sa propre condition humaine et son rapport au monde et aux autres.
“Weaver’s Left” continue sur la lancée entamée avec “Confluence”, un morceau planant porté par de célestes chants. Mais d’intenses incursions soniques viennent peu à peu perturber ce moment d’apaisement. Comme si nous apercevions par bribes un spectacle stellaire titanesque avant de véritablement se concentrer dessus et progressivement se rendre compte de l’ampleur astronomique de ce qui se passe devant nous. “Uruk” nous fait doucement planer vers le dernier gros morceau de ce titanesque album “The Story That Has Never Been Told”. Morceau à l’image de cet album, atmosphérique et puissant. Cette boucle finale entêtante et hypnotisante qui grossit de plus en plus, parcourant toute la deuxième moitié du morceau est éblouissante. Nous sortons finalement de cette grandiloquente boucle avec une certaine forme d’apaisement comme si nous avions dépassé la limite de notre univers pour en rejoindre un nouveau…. Et le morceau final “Enter The Loop” nous donne un avant goût de cet ailleurs. Et pour le coup, nous nous retrouvons dans un ailleurs beaucoup plus sombre et menaçant. Morceau entièrement ambient, de multiples boucles sonores s’empilent et nous laissent entrevoir quelque chose de menaçant, froid et mécanique, peut être un avant goût de la prochaine transmission du groupe….
“Ilion” n’aurai pas cette ampleur sans cet incroyable mix. Il y a un travail de mixage absolument dantesque. L’attention prêtée à chaque détail est hallucinante, évidemment chaque instrument et les multiples variétés de chants sonnent à merveille. Mais il y a aussi tout ce travail sur la réverbe qui décuple et amplifie tout le spectre musical du groupe. Le côté psychédélique de Slift est véritablement palpable, je le ressens au plus profond de ma chair. Ces murs de sons m’écrase et me font plier face à un spectacle qui me dépasse et puis des ambiances célestes viennent me porter et m'emmènent dans des strates que je n’ai jamais connu. La puissance sonore de cet album est juste phénoménale.
Et bien quel trip ! Quel voyage immense et intense ! Ils avaient déjà tutoyé les sommets avec “Ummon” mais avec “Ilion”, Slift est entré dans la stratosphère et compte bien y rester. L’album pourrait faire trois heures que j’aurai encore l’impression de ne pas être rassasié tant la musique de Slift me fait vivre des choses complètement dantesques. Je n’ai qu’une seule chose à dire, merci les gars !