« Idol », un rituel qui nous dépasse et au cours duquel Horrendous nous prend par la main pour invoquer démons et déesses et les inviter à peupler nos rêves
Horrendous est un quartet américain formé en 2009 qui, après des débuts purement Death, a choisi de se tourner vers quelque chose de plus Progressif, ce qui s'est retrouvé dans leurs trois albums, « The Chills » en 2012, « Ecdysis » en 2014 et « Anareta » en 2015. Cette fois-ci, le groupe nous présente une « monstruosité […], une entité homogène et transparente qui exige d'être écoutée dans son intégralité [tant] chaque pièce est une variation unique d'un ensemble thématique plus vaste - un membre dispersé qui finalement s'assemble en une bête imposante », pour reprendre leur déclaration. Découvrons donc sans plus tarder la nouvelle divinité que nous sommes voués à adorer : « Idol ».
Les guitares de Damian Herring et Matt Knox flirtent avec l'étrange et se font presque Prog/Tech sur ‘…Prescience' qui semble être une introduction à l'album, et plus généralement à l'univers bien particulier d'Horrendous. ‘Soothsayer' nous plonge aussitôt dans le vif du sujet avec une ligne musicale assez intelligemment construite et au mixage très soigné qui permet autant de profiter des guitares aventureuses du groupe que d'une basse inébranlable qui assure à la chanson une assise solide. Le scream a une identité assez forte, ce qui permet au chanteur d'habiller le morceau, déjà composé d'une multitude de lignes instrumentales se superposant, se répondant, se mêlant les unes aux autres dans un chaos finalement assez ordonné et maîtrisé. Introduction atmosphérique et presque Jazz par moments pour la merveilleuse ‘The Idolater' et sa rythmique prenante. Le batteur, Jamie Knox, fait vraiment du bon boulot, en finesse et en nuance, puisque ce sont ici les guitares et les voix qui apportent toute la brutalité du titre. Après ce moment de grâce qui laisse difficilement de marbre, Horrendous nous précipite dans les abîmes de ‘Golgothan Tongues' dont la partie instrumentale semble s'enrouler autour de nous comme autant de serpents des enfers dont la pression se fait de plus en plus ressentir au fur et à mesure que la folie nous gagne et que l'horreur se déploie dans toute sa puissance !
Si ‘Divine Anhedonia' peut sembler un peu plus old school dans un premier temps, ce n'est que pour mieux saisir l'auditeur confiant qui aura baisser sa garde avec une ligne de basse d'une pureté et d'une simplicité rare qui fait parfaitement contrepoids aux forces combinées des guitares et de la batterie. A l'hypnose, calme et douce, succède la transe, agressive et inquiétante, accompagnée de suppliques et de gesticulations désordonnées ; et Horrendous excelle dans ces deux domaines. Le groupe nous propose un titre plus effréné avec ‘Devotion (Blood for Ink)' qui emprunte au Thrash et laisse presque (attendez la fin du morceau avant de vous prononcer) de côté les expérimentations Prog auxquelles le groupe nous a habitués. Au contraire, une rythmique d'une grande efficacité et d'une lisibilité absolue prend le dessus et donnera sans aucun doute de furieuses envies de headbanguer ! Mélancolique et maîtrisée, ‘Threnody…' laisse approcher la fin de l'album avec délicatesse grâce à des guitares légères. On se laisse envelopper de cette beauté et de cette sérénité et on s'apprête à quitter, à regret, le monde merveilleux d'Horrendous. Heureusement que les huit minutes d'‘Obolus', marquées par un très beau chant clair en réponse au scream, sont là pour nous rappeler qu'on peut revenir se réfugier dans ce temple musical.
« Idol » est un album dont la qualité musicale rivalise avec la sensibilité, et qui contredit toutes les critiques quant à la froideur des genres liés au Prog qui ne seraient intéressés que par une quête technique, délaissant toute chaleur humaine. Horrendous nous prend par la main dans un rituel qui nous dépasse mais qui va peupler nos rêves de fantômes et de créatures inconnues.