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Drif

Enora
Journaliste

Heilung

"Drif" est un bon album qui ne dénote pas dans la discographie d’Heilung, cependant, on peut se demander si, une fois la surprise passée la magie ne se dissipe pas un peu…
9 titres
pagan folk
Durée : 59
Sorti le 19/08/2022
1381 vues

Depuis 2014, Kai Uwe Faust, Christopher Juul et Maria Franz se sont associés pour former Heilung ("guérison" en allemand), un projet Néo-Folk qui a déjà sorti trois albums : "Ofnir" (2015, réédité en 2018), "Lifa" (2017), et "Futha" (2019). Leur réputation n’est plus à faire, que ce soit parmi les fans du genre ou auprès du grand public sensibilisé à cet univers par la pop culture, mais penchons-nous sur "Drif", leur dernière création !

Des voix masculines graves accueillent l’auditeur pour les premières secondes d’’Asja’ avant que des cordes et des percussions se joignent à elles. Après cette entrée en matière pour le moins solennelle, le chant de Maria Franz s’élève, doux et éthéré. Moins hypnotique, 'Anoana' résonne, portée par une voix pleine de conviction qui ramène à la vie les contours d’un univers aujourd’hui disparu. Mais lorsqu’on va au-delà de cette idée d’évocation d’un passé fantasmé, on réalise à quel point les compositions d’Heilung répondent en vérité à un besoin toujours d’actualité : la fusion avec un Autre indéfinissable (une divinité pour certains, la nature pour d’autres), l’ouverture à un Ailleurs (parfois intérieur, parfois extérieur) plus grand, l’élévation vers la Beauté qu’on peut avoir tendance à oublier dans notre vie quotidienne.

Une voix masculine guide un choeur d’enfants qui répètent en boucle quelques mots en introduction à 'Tenet'. La puissance de cette chanson vient de la simple association de voix et de percussions. Cette composition est la plus ancienne forme de musique possible et elle éveille une sensibilité enfouie en nous, qui prend des accents glaçants à mi-parcours lorsque l’ambiance se tend particulièrement avant une conclusion simplement magique. 'Urbani' nous plonge au coeur d’une forêt et nous berce de chants d’oiseaux jusqu’à ce qu’un grondement sourd ne s’élève, se transformant finalement en martèlement et en phrases scandées.

Sans transition, une voix parlée en allemand ouvre 'Keltentrauer', dominant des bruits indistincts qui peuvent être le crépitement du feu comme les claquements de milliers d’insectes. On finit par distinguer des cris humains et des sons métalliques qui évoquent un conflit armé ; il s’agit en fait du récit de la lutte des tribus celtes contre l’empire romain qui cherchait à conquérir la Germanie. Soyons honnêtes, si on ne parle pas allemand ou qu’on écoute Heilung purement pour sa musique, ces huit minutes sont longues… Sur 'Nesso', les touches de voix féminines remplacent presque un clavier superposé à des nappes de notes fredonnées. L’ajout d’un instrument à cordes est bienvenu pour diversifier un peu ce que le groupe nous propose avec ce "Drif"

'Buslas Bann' vient rappeler, à toutes fins utiles, qu’un morceau court, maîtrisé et impactant, vaut parfois mieux qu’un étalage de capacités techniques et émotionnelles. En "seulement" cinq minutes, ce qui est vraiment court pour le groupe, ce morceau parvient à imposer une atmosphère sombre et entêtante dont la complexité se déploie sous nos yeux. L’effet de choeur sur 'Nikkal' est tout simplement à couper le souffle de beauté et de délicatesse ! Sans transition, 'Marduk' vient conclure cet album en mêlant une voix susurrée qui semble surgir des ténèbres et des sons d’ambiance qui nous mettent étrangement mal à l’aise au fur et à mesure que le titre avance.

En conclusion, "Drif" est un bon album qui ne dénote pas dans la discographie d’Heilung. Cependant, on peut se demander si, une fois la surprise passée (ce qui est le cas puisqu’il s’agit déjà de leur quatrième album) la magie ne se dissipe pas un peu. S’il ne fait aucun doute que le groupe a une présence incroyable sur scène et livre des performances saisissantes, il est moins sûr que se précipiter pour écouter leurs derniers morceaux ait réellement un intérêt hors de tout contexte ; mais libre à chacun de se faire un avis là-dessus.

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