Sorti en 2014, « Blood In Blood Out » marquait le (deuxième) retour au bercail du hurleur Steve « Zetro » Souza, suite au départ de Rob Dukes après neuf ans de bons et loyaux services. A cette période, tout n’était pas simple pour nos thrashers. Le groupe devait jouer en live sans leur guitariste-compositeur-parolier principal, Gary Holt, parti épauler Slayer en tournées (et sur leur ultime effort « Repentless »). Finalement, quand Kerry King & cie ont décidés de raccrocher définitivement leurs gants fin 2019, le sixcordiste a pu se (re)consacrer à 100% à sa formation référence.
En cette dernière partie de 2021, nos vétérans de la Baie de San Francisco s’en reviennent donc avec leur onzième opus studio nommé « Persona Non Grata » (locution latine signifiant littéralement « Personne qui n’est pas la bienvenue »). Dixit nos lascars, « C’est putain de lourd, rapide, brutal, violent […] C’est comme si nous avions à nouveau tous faim ». Après écoutes de ce nouveau matériel, on peut effectivement confirmer que les parties sauvages ne manquent pas (le frénétique 'The Beatings Will Continue (Until Morale Improves)'). Derrière son kit, Tom Hunting est déchainé et cogne comme pour tuer. Véritable force motrice, le frappeur entraine ses petits camarades dans toutes ces batailles rangées qui nous sont offertes. Le quintette ne fait pas dans la dentelle avec des bastos dans la pure tradition thrash metal (genre que nos gaillards n’ont jamais renié). En avant les coups de boules virils.
Voulues de cette manière, de nombreuses compos contiennent des accroches musicales et/ou vocales. Un gimmick de guitares par ci (le « mélodique » 'The Years Of Death And Dying'), des gros refrains rassembleurs par-là ('Slipping Into Madness'). Accompagnés par la basse bien présente et costaude de Jack Gibson, les duettistes Gary Holt / Lee Altus (Heathen) restent fidèles aux riffs assassins ('Elitist') et aux joutes furieuses ('Clickbait') qu’ils affectionnent. Ça file parfois à toute berzingue. Partageuse, la paire a conviée l’ex-pourfendeur Rick Hunolt (membre du combo entre 1985 et 2004) à venir balancer deux-trois leads de grattes et pousser quelques chœurs puissants ici et là. Il semble d’ailleurs que la The H-Team (comprendre le tandem Holt/Hunolt) va se reformer le temps de plusieurs concerts lors de la future tournée. Ce n’est pas beau la vie ?
Au milieu de ces mêlées destructives, Exodus se montre tout aussi intéressant (voire encore plus) et inspiré sur les morceaux plus longs et variés (la plage éponyme et 'Lunatic-Liar-Lord' dépassant tous deux les sept minutes et demie). Toutes ces structures plus « travaillées » et moins « basiquement bourrines » élargissent les propositions et c’est tant mieux. Grâce aux variations rythmiques et à quelques idées bien amenées (le glas glaçant de 'Prescribing Horror'), les titres gagnent en profondeur.
Dans le style « mise en ambiance qui fait monter la sauce », on ne peut qu’apprécier le petit interlude acoustique ('Cosa Del Pantano') qui nous renvoi direct dans le bayou en compagnie des moustiques et autres alligators (le culte 'Cajun Hell' et ses croassements de grenouilles n’est pas loin).
Au chant, « Zetro » livre ici l’une de ses meilleures performances. Avec son timbre d’écorché vif si connu, l’étasunien se montre sans pitié à maintes occasions (le monstrueux 'R.E.M.F.'). Entre débit « à la mitraillette » et passages plus rauques ('The Fires Of Division'), le frontman ne lâche rien.
Malgré quelques légères « facilités » thrash, ce dévastateur « Persona Non Grata » est probablement le skeud le plus équilibré qu’Exodus n’ait jamais fait. Le groupe fête cette année ses quarante ans d’existence. Après s’être envoyé ce présent méfait, force est de constater que le quadra se porte très bien. L’équipe est sur une dynamique positive. Gary en a fini avec les clopes, la meth et l’alcool. Tom se réadapte gentiment suite à sa récente (et réussie) ablation de l’estomac pour se débarrasser d’une tumeur cancéreuse. De son côté, le gars Souza se sent revivre après son impressionnante perte de poids (plus de 20 kg déjà perdus et il ne compte pas s’arrêter là). Tous les voyants sont au vert pour de futures bombes de cette belle trempe. Qui oserait s’en plaindre ?