DEEP PURPLE
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Heavy Metal/Hard Rock

Turning to crime
Fabien
Journaliste

DEEP PURPLE

«Si certaines reprises témoignent du savoir-faire du quintette, d'autres tendent franchement à laisser de marbre»

11 titres
Heavy Metal/Hard Rock
Durée: 45 mn
Sortie le 26/11/2021
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Il paraît que la vieillesse est un naufrage, c'est du moins ce qu'en disent certains jouvenceaux acnéiques prompts à accabler de leur voix de fausset, les boomers réfractaires au politiquement correct. Ils auraient sans doute raison si tous les navires étaient faits du même bois, or il est d'antiques esquifs rétifs aux récifs et qui refusent mordicus de s'échouer pour profiter encore d'une vague histoire de défier l'inéluctable.

22 albums rien que cela, souvent bons d'ailleurs, rarement dispensables et parfois tout bonnement cultes, 73 ans de moyenne d'âge, des musiciens au pedigree insensé : bienvenue dans la galaxie Deep Purple et ses chiffres affolants. A l'âge où certains font leur sudoku en regardant Mireille Dumas, les ancêtres de la Perfide Albion se sont retrouvés pour faire de la musique, juste de la musique, des reprises pour le fun affirmant bruyamment qu'ils continueront à s'amuser, à jammer sans se soucier de savoir s'ils retrouveront leur lustre d'antan. Les regrets ne démolissent que ceux qui n'ont d'horizon que celui vainement contemplé dans le rétroviseur.

55 ans après leur premier album et 15 mois après leur dernière offrande, les septuagénaires du pourpre profond, remettent ça en sortant '' Turning to Crime''. Ça fleure bon le plaisir de se retrouver sans imaginer que la révolution est en marche, c'est souvent le but d'un album de reprises, il est vrai.

La première piste est d'ailleurs plutôt engageante car le quintette s'amuse allègrement avec ce '7 and 7 is' du groupe Love dont la version originale, déjà redoutable, se trouve paradoxalement rajeunie par nos vieux routards, mention spéciale à un Ian Gillan en pleine forme pour l'occasion. Il en va de même du reste avec ce 'Oh Well' de Fleetwood Mac, doté d'un solo néo-classique du plus bel effet et qui témoigne de cette volonté de se réapproprier certains des standards choisis par la bande.

Pourtant, si la liberté de choix a du bon, elle ne peut éviter de susciter un drôle de sentiment, un sentiment insidieux naviguant en eaux troubles, entre le respect curieux et l'indifférence polie. Dès lors, si certaines reprises témoignent du savoir-faire du quintette, d'autres tendent franchement à laisser de marbre. Ainsi, on sera sans doute moins convaincu par le 'Watching the river flow' de Bob Dylan et l'on s'interrogera même sur le choix country de 'the battle of new orleans' de Jimmy Driftwood ou encore sur celui de 'White room' de Cream à la plus-value plus que discutable. Alors, bien évidemment, il n'y a rien de scandaleux dans cette approche mais rien de bien excitant non plus. C'est sans doute là que le bat blesse car clairement Deep Purple ne cherche plus à faire mouche.

Après Lee Aaron et son ''Almost Christmas'', c'est au tour de Deep Purple de se métamorphoser en jukebox de luxe. On peut comprendre la démarche de musiciens qui ont besoin, en ces temps épidémiques, de taquiner leurs instruments. Reste que le résultat va certainement avoir beaucoup de peine à soulever les foules, les amateurs de classiques en auront pour leur argent parce que ces gars-là respirent le rock, les autres, nombreux à n'en point douter, rongeront leur frein en attendant une offrande plus consistante.