Il y a trente ans paraissait ''Transilvanian Hunger'', troisième volet de la période noir et blanc de Darkthrone (entamée avec ''A Blaze In The Northern Sky''), un manifeste de black metal minimaliste baptisé ‘’trve’’ par ses géniteurs. Caractérisé par un son cru, une batterie hypnotique et un nihilisme totalement assumé, ce condensé de noirceur avait ouvert la voie à un sous-genre de metal noir, toujours prisé aujourd’hui.
Trois décennies et quinze albums plus tard, le binôme s’est progressivement éloigné du creuset black, s’essayant à différent genres, le punk notamment, avant de revenir à des sonorités seventies, à l’instar de ses compatriotes Enslaved. Les Norvégiens semblant avoir trouvé leur voie depuis quelques années, ''It Beckons Us All'' s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur, à savoir un metal lourd et rugueux inspiré par les pionniers du heavy metal, Black Sabbath en tête. Ici les tempi sont majoritairement lents, les rythmiques pesantes et la batterie dotée d’un son organique.
'The Heavy End' porte bien son nom, les riffs pachydermiques semblant égrenés par une main plombée qui n’est pas sans rappeler un certain Tom Warrior période Celtic Frost. Fils spirituel de l’ange Gabriel, Nocturno Culto en reprend le phrasé et les intonations vocales ('Howling primitive Colonies').
On décèle également de ci de là des influences NWOBHM, sur 'Howling Primitive Colonies' ou l’envoutant 'Black Dawn Affiliation', dont le final au chant incantatoire sur fond de claviers aérien donne un côté cérémonial à cette troisième piste.
Quelques réminiscences black metal parsèment 'Eon 3' et 'The Bird People Of Nordland' via des tremolos de guitare, rappelant ainsi les origines du groupe. Mais la lourdeur reprend ses droits sur l’instrumental 'And In That Moment I Knew The Answer' et le conclusif 'The Lone Pines Of The Lost Planet', pièce de dix minutes d’une grande richesse. Si l’intro en son clair n’est pas sans rappeler le 'Goodbye Blue Sky' de Pink Floyd (The Wall), le corps du morceau propose des harmonies inédites et se distingue par un break acoustique ponctué d’un chant aérien des plus apaisants.
Avec cette cuvée 2024, Darkthrone, vétéran de la scène norvégienne, démontre sa capacité à aller de l’avant et, tel un bon cru, se bonifie avec les années.