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Terrasite

Julien Pingenot
Journaliste

Cattle Decapitation

Avec ce dixième album "Terrasite", Cattle Decapitation prouve encore une fois qu'il est un des groupes les plus intéressant de ces dix dernières années !
10 titres
Deathgrind
Durée : 52
Sorti le 12/05/2023
1752 vues

Cattle decapitation s'est lentement mais sûrement imposé comme une des formations de metal extrême les plus intéressantes de ces dix dernières années. Formé il y a plus de 25 ans comme un groupe de grind plutôt bas du front, bien exécuté mais qui ne réinventent pas la roue. Assez classique musicalement à ses débuts, ce qui ne l'était pas pour le coup était son engagement en faveur de la cause animale et des dérives de l'homme sur son environnement. Depuis le début, Cattle en a fait son cheval de bataille ! Suite à deux albums où le groupe se cherchait, c'est sur "To Serve Man" que Cattle Decapitation commence sa mue en le groupe que l'on connaît aujourd'hui. D'ailleurs, cet album est le premier à sortir chez Metal Blade Records, à qui, le groupe ne fera jamais défaut jusqu'à aujourd'hui pour la sortie de son 10e album: "Terrasite".

Depuis la sortie de "Monolith of Inhumanity" puis "The Anthropocene Extinction" qui confirma l'essai, Cattle Decapitation est au sommet de son art. Chaque nouvelle sortie est phénoménale en tout points et réussissant à surpasser son prédécesseur. "Anthropocene" surpassait "Monolith", "Death Atlas" surpassant "Anthropocene" et vous vous en doutez "Terrasite" surpasse "Death Atlas". Oui, je l'annonce d'emblée ce nouvel album de la bande de San Diego est une nouvelle fois fascinant en tout point et montre un groupe plus inspiré que jamais et qui n'est pas prêt de laisser son trône de sitôt.

"Death Atlas" nous dépeignait la fin de l'humanité (et a aussi quasiment anticipé la pandémie de covid-19) causé par l'impact de l'homme sur son environnement, "Terrasite" prend la suite de l'histoire et nous compte la suite de cette histoire de notre extinction.

Comme dit plus haut, la musique des américains ne fait que s'étoffer en mélangeant de plus en plus et de mieux mieux une myriade d'influences allant du grind ou black. Et ce "Terrasite" ne fait pas exception. Le morceau d'ouverture "Terrasitic Adaptation" nous plonge directement au cœur de cette nouvelle apocalypse. Avec ses grosses influences black, ce morceau dépeint bien l'urgence d'une situation qui nous a échappée. Après cette entrée en matière bien dense, les deux singles "We Eat Our Young" et "Scourge of the Offsprings" viennent nous assommer par leur lourdeur et Cattle nous rappelle qu'il est avant-tout un groupe de deathgrind en son cœur. Cette multitude d'influence apporte une vraie originalité, identité et couleur à cet album. L'atmosphère apocalyptique qui s'en dégage est comme aucune autre et une véritable sensation de danger se fait ressentir, l'imminence d'une fin qui est déjà là. Ce danger rôde tout du long et frappe sur nous à plusieurs reprises comme sur le break de fin de "Scourge of the Offsprings", toute la fin de "The Insignificant" où est scandé "We have always been the virus..." nous faisant réaliser que nous sommes la cause de cet effondrement. Ou bien les breaks bien corsés sur "A Phobic Doom" et "Dead End Residents" montrant que Cattle Decapitation n'a rien perdu de sa fureur et sait quand se montrer violent. Là où "Death Atlas" était très sombre et porté sur le narratif avec l'usage de samples et voix nous mettant dans l'ambiance, sur "Terrasite" le groupe s'est concentré sur la musique sans fioritures supplémentaires. Si sur "Death Atlas", ce côté narratif pouvait me déranger par moment, ici il n'en ai rien, chaque minutes de ce "Terrasite" est un bonheur. Cattle s'est véritablement surpassé. Chaque morceau est brillamment écrit et joué mais si je devais me concentrer sur un seul, "Just Another Body" serait celui sur lequel je me pencherai. Ce morceau de plus de dix minutes est un pur concentré de tout le savoir faire des américains, on passe par toutes les couleurs du spectre musical du groupe. Le côté atmosphérique du groupe ressort plus que jamais, la mélancolie d'une ère qui touche à sa fin se fait beaucoup ressentir, appuyé par le très poignant chant clair de Travis Ryan chantant la complainte d'une âme perdue. C'est un des plus beaux morceaux que Cattle ai écrit à ce jour. Cette fin est hyper touchante et clôt à merveille un album tout aussi merveilleux.

Si ce groupe et cet album sont si bons, rendons hommage aux créateurs qui se cachent derrière. Chaque musicien est au sommet de son art, surtout ceux qui sont là depuis un moment comme le batteur David McGraw, qui avec son jeu versatile et chirurgical est tout bonnement impressionnant sur ce nouvel album. Ensuite, Josh Elmore, longtemps guitariste unique avant d'être rejoint par Belisario Dimuzio sur "Death Atlas", est un des architectes principal de Cattle Decapitation. Son jeu de guitare est d'une inventivité folle et d'une diversité sans limite. Et enfin, rendons hommage à l'immense Travis Ryan, un des meilleurs vocalistes extrêmes de sa génération. Ryan est tout simplement bluffant, chaque album de Cattle me laisse bouche-bée d'admiration par ses performances. Sa technique est juste fantastique, allant de growl le plus profond et guttural ou cri suraigu sans problème et lorsque qu'il se met à "chanter", on ne touche plus sol, "...And the World Will Go on Without You" est un très bon exemple. Avec ce "chant", il réussit à insuffler de l'épique sur des passages étouffants de brutalité. En plus d'être un vocaliste plus que talentueux et extrêmement versatile, toutes les thématiques et concepts du groupe sont élaborés et mis en place par ce dernier dont l'engagement est total. Il faut aussi créditer le travail magistral de Dave Otero, qui enregistra et fit le mix de l'album. Otero est quelqu'un de bien installé maintenant mais force est de constater que son travail est toujours d'aussi bonne qualité. Le son de l'album est massif, féroce. Une certaine clarté se dégage mais parfaitement contrebalancée par une sorte de crasse et de rugosité (l'ajout d'infra basse lors des breaks fait bien son effet) dont lui-seul à le secret.

Aujourd'hui, Cattle Decapitation n'a plus rien à prouver à personne et chaque nouvelle sortie est un petit événement tant la rigueur du groupe est admirable. "Terrasite" ne fait pas exception à règle, c'est une nouvelle fois, un album grandiose, d'une grande richesse artistique et thématique. Cet album m'a énormément touché, bien que très brutal dans son ensemble, la beauté mélancolique qui s'en dégage est poignante et sincère.
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