BLEED
Plus d'infos sur BLEED
Alternative / Metal / Rock

Somebody’s Closer
Fabien
Journaliste

BLEED

«Sorti de nulle part, Bleed est tout simplement bluffant et nul doute que l'hémorragie de bruit et de fureur dont il nous gratifie laisse augurer de bien belles choses à venir.»

4 titres
Alternative / Metal / Rock
Durée: 14 mn
Sortie le 26/07/2022
825 vues
C'est dans les vieux pots que l'on fait les meilleures soupes... admettons mais c'est surtout avec des ingrédients dignes de ce nom. C'est cette sagesse que semblent avoir intégré les Texans de Bleed qui viennent de commettre avec ce ''Somebody's Closer'', un EP auquel personne ne s'attendait vraiment. Comment définir alors cette bonne vieille recette à la sauce texane ? Un soupçon de grunge, deux grammes de nu-métal, un nuage de métal alternatif... bref, dit comme ça vous adhérez par principe... l'écoute finira de vous convaincre car cette mise en bouche de quatre titres n'est rien de moins que monstrueuse. Quatre titres, c'est peu certes mais cela laisse entrevoir une suite qu'on imagine dantesque pour peu que les bonhommes soient capables de reproduire ce genre de performances.

Biberonné au son des nineties, Bleed lorgne avec une gourmandise à peine dissimulée du côté de ses illustres aînés mais parvient néanmoins à réaliser un agrégat très actuel et bigrement cohérent. Le son, pesant, abrasif, est le fils aîné d'un rouleau-compresseur tandis que la rythmique forme un soubassement massif qui au détour d'un riff s'arrange toujours pour asséner un plan mastoc susceptible de dérider les plus vieilles pommes... Et pour filer la métaphore fruitière, reste une petite cerise, celle que l'on place sur ce roboratif gâteau... cette cerise, c'est la voix de Ryan Hughes, une voix anodine en apparence, légèrement sous-mixée, planante et un brin nonchalante qui choisit systématiquement la nappe plutôt que le hurlement. Tout ça ne vous rappelle rien... Deftones. En effet, l'ombre de Chino et de sa bande plane au-dessus de cet EP sans qu'il soit jamais question, et c'est une performance, de plagiat. J'entends ceux du fond qui pensent aussi à Helmet et à Soul Minds... pourquoi pas, ces références restent éminemment acceptables.

Quoi qu'il en soit, les quatre morceaux déclinent avec une maestria assez renversante les diverses nuances bruitistes du catalogue métallique. Minimalistes parfois, plus exubérants en d'autres occasions, les Texans varient les plaisirs et composent avec une facilité presque agaçante des hymnes d'une saleté jubilatoire aux dissonances aigres-douces assez délicieuses en bouche, dissonances qui ne sont d'ailleurs pas sans évoquer certaines effluves plus noisy. 'Silver' et 'Burnt' sont ainsi des missiles infaillibles et tiennent à la fois du grunge le plus inspiré et du nu-metal le plus percutant. Pourtant, s'il interpelle par sa puissance de feu, le quatuor privilégie assez largement le mid-tempo ce qui lui permet d'alourdir le propos voire de le rendre tout à fait reptilien et retors ('Enervation'). Bref, vous l'aurez compris, cet EP frôle pour ne pas dire atteint la perfection... Reste désormais à attendre l'album qui, s'il s'avère aussi détonant, risque d'installer sur la scène du rock brutal, une meute aux dents acérées.

Sorti de nulle part, Bleed est tout simplement bluffant et nul doute que l'hémorragie de bruit et de fureur dont il nous gratifie laisse augurer de bien belles choses à venir. Qui a dit que les nineties furent une décennie musicale sans grand équivalent ? Un vieux schnock nostalgique sûrement... le problème est que ce vieux schnock n'a pas tort et ce ne sont pas ces quatre Texans qui diront le contraire... ni Sue Ellen et JR d'ailleurs qui, paraît-il, écoutent cet album en boucle à l'ombre de leur derrick...