«Zakk Wylde ouvre les possibilités de groupe en offrant plus de liberté et de place à ses petits camarades de jeux. Vu le présent résultat, cela ne peut augurer que du bon pour les futures productions.»
En 2020, en raison de la pandémie corona-truc et des annulations de concerts, Zakk Wylde s’est retrouvé à l’arrêt. Entre deux promenades avec ses Rottweilers et des longs moments consacrés à ses proches, l’américain a tout de même pris un peu de son temps - avec son trio tribute band Zakk Sabbath - pour enregistrer/mixer « Vertigo », relecture-hommage du légendaire premier effort éponyme de Black Sabbath publié en 1970. Il y a quelques mois, Zakk et son Black Label Society nous livraient le copieux coffret « None More Black » (versions remasterisées et en vinyles des 10 skeuds studio et 2 live déjà parus, accompagnées de pistes bonus, livre photo relié, …).
Cela étant dit, avant de repartir en tournée en 2022 avec le « Prince of Darkness » Ozzy Osbourne, notre guitariste est de retour avec son BLS pour une onzième rondelle. Comme son nom l’indique, ce « Doom Crew Inc. » est une belle déclaration à ses fans (qui lui sont fidèles depuis ses débuts) mais aussi à son staff de roadies/techniciens (qui l’accompagne depuis un sacré bail). Un leitmotiv comme « First to bleed, Last to leave » (NdT : Premier à saigner, Dernier à partir » parle de lui-même.
Musicalement, le successeur de « Grimmest Hits » (2018) conserve quelques codes bien connus. Déjà, compte tenu de l’adoration de Zaak pour le Sabbat Noir anglais, on ne s’étonne pas de (re)trouver quelques intonations vocales Ozzy-iennes ('Destroy & Conquer', 'Ruins') et des riffs doom voire lourds de chez lourds que ne renierait pas le maitre ès six-cordes Tony Iommi lui-même (l’écrasant 'Gospel of Lies'). De même, à l’écoute de plusieurs chansons, pas d’erreur, on est territoire familier avec ces riffing percutants et massifs à la « simplicité » qui fait mouche (le sombre 'You Made Me Want to Live' qui renvoie aux périodes « Sonic Brew » et « The Blessed Hellride »). L’étasunien met un point d’honneur à ne pas trop tomber dans les démonstrations abusives et les effets dans tous les sens. Servir les morceaux sans étaler sa/la technique (et pourtant il pourrait se le permettre). Si parfois on peut reprocher quelques idées rappelant le passé, la sincérité du monsieur n’est pas à remettre en cause.
Malgré cette estampille « BLS » qui se ressent de partout, ce nouvel opus a été pensé un peu différemment. D’une part, mister Wylde a choisi de capter toutes ses parties de six-cordes avant que ses comparses (notamment le bassiste John « JD » DeServio et le frappeur Jeff Fabb) ne mettent en boite leurs propres pistes. Avec les références du patron comme guides, les deux dits lascars ont dû enregistrer leurs trucs « à l’instinct et à la volée » ('Forsaken').
Ensuite, et c’est là une « petite révolution », le chevelu blond a consenti à partager les soli de grattes avec l’autre pourfandeur Dario Lorina (habituellement cantonné au poste de rythmique). On a donc le droit à quelques duels « guitares jumelles » plutôt savoureux dans la tradition de formations telles que Thin Lizzy ('Shelter Me') ou bien encore Judas Priest ('Set You Free' et ses harmoniques diaboliques). Cette complicité ouvre les possibilités musicales et on ne peut que s’en réjouir ('Gather all my Sins').
Pour le reste, est-il possible de livrer un disque de BLS sans y coller une ou deux ballades ? Depuis longtemps maintenant, on sait que sous ses allures de bucheron barbu viril, le dabe de (attentions aux références) Hayley-Rae, Jesse John Michael, Michael Halen Hendrix Rhoads, et Sabbath Page, peut aussi montrer une facette plus sensible. Présentement trois ballades et autant d’approches variées (le piano-voix délicat 'Love Reign Down' (2021 version)', la base acoustique de 'Forever and a Day','Farewell Ballad' qui mêle un peu de tout ça avec un chouia d’électrique en plus). Là aussi, les leads et les soli de guitares sont chiadés et bien amenés.
« Doom Crew Inc. » s’inscrit clairement dans la continuité logique de la discographie de Black Label Society. Même si Zaak Wylde demeure la tête-pensante du projet, il ouvre les possibilités de groupe en offrant plus de liberté et de place à ses petits camarades de jeux. Vu le présent résultat, cela ne peut augurer que du bon pour les futures productions.