Chroniques

Behold Electric Guitar
Fred H
Journaliste

PAUL GILBERT

«Disque frais, au ton léger et décalé, follement diversifié et pourtant tout à fait cohérent. Paul Gilbert accouche d'une rondelle qui ne peut que plaire aux aficionados de la 6-cordes, aux fans de rock et aux férus de belles mélodies»

12 titres
Rock
Durée: 58'44 mn
Sortie le 17/05/2019
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Quelques mois après un Nieme album live commis avec Mr. Big (sorte d'hommage-adieu au batteur Pat Torpey disparu début 2018), l'ami Paul Gilbert revient en solo avec ce « Behold Electric Guitar », quatre piges après son dernier effort « I Can Destroy ».

Depuis quelques années, le garçon a déménagé du coté de Portland dans l'Oregon. C'est donc tout naturellement que notre toujours guitariste de Racer X (le combo est inactif mais n'a pas officiellement splitté) a choisi d'embaucher des zicos du cru pour l'épauler. On retrouve ainsi Bill Ray, Reinhardt Melz ainsi que Brian Foxworth derrière les fûts, Asher Fulero aux claviers et Roland Guerin à la basse. Pour mettre sur bandes tout ce petit monde, c'est John Cuniberti (ingé son et producteur surtout connu pour ses nombreuses collaborations avec Joe Satriani) qui a été recruté. Le processus d'écriture de ce nouvel opus est assez étonnant. Paul à composer ses chansons en y incluant d'abord des paroles. Ensuite, le malin à supprimer ces phrasés vocaux initialement prévus pour les retraduire et les transformer en mélodies, accords et arrangements pour partitions de grattes.

L'oeuvre est donc presque intégralement instrumentale. En fait, un seul morceau ('A Herd Of Turtles' ('Un troupeau de tortues')) est « chanté » (parlé serait un terme plus adéquat). Paul récite ici un genre de poème avec une diction très british au milieu d'une plage de funk frénétique. Tout au long de la galette, l'adepte de l'Ibanez (et de la perceuse sans fil, niark niark) montre ici son talent et sa créativité dans des territoires musicaux éloignés du métal. Le natif de de Carbondale (Illinois) et sa clique varient les styles, allant du rock survitaminé, au blues (le shuffle de 'Blues For Rabbit' ('Blues Pour Lapin'), en passant par le jazz ('Love Is The Saddest Thing') ou encore le funk ('Sir, You Need To Calm Down' ('Monsieur, vous devez vous calmer'). Au gré des pistes, de manière bien présente et impliquée ('A Snake Just Bit My Toe' ('Un serpent mordit mon orteil')), la section rythmique saupoudre tout un tas de couleurs venant enrichir les compositions.

Puriste, le sieur Gilbert n'a pas voulu triché. Pas d'overdub, pas de retouches… un unique micro sur la guitare et que des prises Live et directes pour ne faire jaillir que des sonorités non trafiquées. Inspiré et inventif ('I Love My Lawnmower' ('J'aime ma tondeuse à gazon'), l'américain nous gratifie de longs soli de guitare en enfilades ('Havin' It'). La maîtrise technique est là. Totalement libre, Paul se lâche et démontre toute sa virtuosité (le morceau éponyme). Ici et là, certaines interventions de sixcordes rappellent le « Satch » (avec lequel Paul à jouer en 2007 pour la tournée G3), Jimi Hendrix (la wah-wah s'affole sur 'Things Can Walk To You') ou parfois Jeff Beck ('I Own A Building'). L'homme au casque de protection auditif (il souffre d'acouphènes à une oreille) alterne déluge de notes ('Let That Battery Die'), descentes de manches à vous donner le vertige, riffs ciselés et instants plus groovy ou subtils. Globalement, notre lascar balance de chouettes mélodies travaillées (le dynamique 'Every Snare Drum', 'Everywhere That Mary Went').

« Behold Electric Guitar » est un disque frais, au ton léger et décalé (avec des titres de chansons pour le moins tordants), follement diversifié et pourtant tout à fait cohérent. Secondé par des pointures, Paul Gilbert accouche d'une rondelle qui ne peut que plaire aux aficionados de la 6-cordes, aux fans de rock et aux férus de belles mélodies.