SHINING (NORWAY)
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Blackjazz

Animal
Chozo Tull
Journaliste

SHINING (NORWAY)

«Shining décide de faire un virage stylistique à 180 degrés, et s'enfonce dans un rock qui n'a rien de remarquable et accumule les clichés. »

10 titres
Blackjazz
Durée: 37 mn
Sortie le 19/10/2018
4209 vues
Shining, c'est le groupe dont le pote de votre pote vous a parlé au fin fond d'un bar pendant que les gens que vous connaissiez mieux sont partis pisser. ''Et sinon, tu connais Shining ? Les Norvégiens ? Mec ils ont fait un album qui s'appelle Blackjazz, c'est dingue, faut que t'écoutes. En plus y'a du sax.'' Ne mentez pas, vous avez forcément cette personne dans votre cercle plus ou moins proche. Sauf si cette personne, c'est vous, of course.
Donc, Shining, groupe de metal prog crimsonien en diable, connus pour la difficulté de leurs compositions et leur approche radicale du prog (plus punk Frippien mélangé avec la précision clinique du metal moderne qu'envolées à la Yes sur fond de Dream Theater), sortent aujourd'hui un album tout néon, tout catchy, tout rock, tout immédiat, tout simple. Déjà, plus de la moitié de leur fanbase doit être aux fraises. Mais ne soyons mesquins, et reconnaissons le courage de l'entreprise. Alors, papillon ou larve ?

Evidemment, la réponse sera toujours un peu subjective. Certains ne voudront même pas entendre parler de cet album. Et il s'en trouvera toujours qui aimeront sincèrement plusieurs morceaux sur Animal. En l'état, malgré tout, il est assez difficile d'éviter l'évidence : Animal n'a que peu de souffle et ressasse beaucoup de clichés au nom d'une efficacité surestimée. Comme on peut s'en douter au premier coup d'oeil jeté à la pochette, l'album se rajoute à la longue liste des artistes de tous bords qui ont décidé de capitaliser sur le revival 80's désormais devenu totalement et irrémédiablement mainstream. Preuve à l'appui, les premières notes de clavier sont une référence appuyée à Journey et leur méga-hit ''Separate Ways''. On retrouve cette envie de synthés sur ''My Church'' et '' Fight Song'' - cette dernière s'ouvre d'ailleurs sur une sorte de faux BM bien agréable, mai au lieu d'explorer plusieurs genres et de créer des ponts entre écoles musicales, Shining décide de remettre un riff sans intérêt juste après. Le refrain fait bien revenir quelque chose de vaguement épique, mais ne réussit pas à convaincre. Ce que le groupe voudrait présenter comme un heavy rock immédiat et catchy peine à captiver l'auditeur, la faute surtout à une compression omniprésente qui uniformise les riffs et ne laisse virtuellement aucune place à la dynamique. Alors oui, l'album est cohérent, mais il est également très monolithique. A vouloir absolument rechercher la simplicité, Shining se fourvoie souvent dans des morceaux qui manquent de relief et d'intérêt. Preuve en est, ce ''Fight Song'' plus que poussif.

Dès les premières notes de la power ballad ''When The Lights Go Down'', on comprend qu'il n'y a que très peu d'espoir sur cette galette : le groupe la joue sirupeuse et semble faire un effort conscient de nous présenter du déjà-entendu à toutes les sauces. Cela en devient presque risible dans ''Animal'', avec la phrase maladroitement ado ''I'm a fucking animal !''. Biffy Clyro avait déjà sorti un morceau médiocre avec ce titre et cette phrase dedans. D'ailleurs, Biffy Clyro est dans la liste des influences dans la com que le groupe fait autour de l'album. Coïncidence rigolote, mais qui n'en est peut-être pas une. Il y a d'ailleurs dans le chant un côté metalcore passé à la moulinette pop, qui en devient presque gênant, puisque l'on sait que le groupe aurait sûrement les moyens mélodiques et harmoniques de faire quelque chose de très intéressant et d'accessible si ils n'avaient pas décidé de brandir leur changement stylistique avec autant de force.

Bref, l'album ne laisse que peu de traces. Surproduit, sans surprises, mais sans réelle honnêteté musicale, Animal est une erreur de parcours, qui ne manquera toutefois pas de faire parler du groupe. Mission accomplie ?