Les joyeux lurons d'Anaal Nathrakh reviennent en ce début de mois d'Octobre avec son onzième brûlot qu'est : « Endarkment ». Pour les non-initiés, Anaal Nathrakh est une formation Black/Grind originaire d'Angleterre. Originellement prévu pour rester un projet de studio, ce n'est qu'en 2005, que la formation prend la route. Ayant aidé à faire émerger et donner ses lettres de noblesse à un genre comme le Black/Grind, les anglais possèdent dans leur discographie de véritables chef d'œuvre de noirceur et de brutalité sans concession. Le combo d'albums : « Hell is Empty, and All The Devils are Here » et surtout l'immense « In The Constellation of The Black Widow » a permis au groupe de se hisser parmi les plus grands.
« A New Kind of Horror » était un album qui m'avait laissé sur le côté avec son côté industriel trop prononcé et puis je le trouvais assez fouillis dans son ensemble. Bref, nous sommes en 2020, deux années assez intenses viennent de passer, une petite pandémie mondiale s'est pointée, c'est assez logique de revoir nos anglais survoltés débarquer avec un nouvel album aussi rapidement.
Si je devais qualifier la musique d'Anaal Nathrakh ce serai un savant mélange des rythmiques syncopés du Black Industriel avec la fureur et l'énergie du Grindcore. De plus, le groupe se caractérise par ses multiples chants, tous incarnés par V.I.T.R.I.O.L. qui arrive sans soucis à faire naviguer son chant entre le growl le plus profond et grave au chant clair épique et symphonique digne de chanteur d'opéra ou même par moment rivalisant avec le grand King Diamond.
L'album s'ouvre sur le morceau éponyme et ne nous fais pas subir une introduction ambiante, non c'est direct la correction. Et avec ce premier morceau, on sent la volonté du duo d'effectuer une sorte de retour aux sources. En effet, le côté Black Metal du groupe est bien plus mis en avant et évince quelque peu le côté industriel, beaucoup trop présent à mon goût dans les derniers albums du groupe. Suite à cette ouverture, nous embarquons dans plus de quarante minutes en plein Armageddon sonore. Comme les précédents efforts du groupe, cet album n'est pas accessible au tout venant, en effet, Anaal Nathrakh joue une musique qui se veut apocalyptique et sait y mettre les formes ! Du coup, on se retrouve avec une musique étouffante, éminemment violente, aux multiples arrangements sonores qui apporte de la « texture » aux morceaux et qui rendent la musique des anglais complexe et surprenante. Avec une musique aussi jusqu’au-boutiste, l'album regorge d'ambiances variées. Le très syncopé et direct « Thus, Always, To Tyrants », nous fera retrouver les racines Grindcore du groupe. Comme dit plus haut, le côté Black que l'on pourra qualifier de Brutal Black, à la manière d'un Infernal War ou Funeral Mist, se fait beaucoup plus présent sur la galette. Des morceaux comme « Beyond Words » ou « Requiem » en sont de bons exemples.
Même si cet album est une nouvelle fois d'une grande noirceur et d'un nihilisme total, certains passages et morceaux sont un peu plus « lumineux » que le reste et apportent du contraste et de la variété à l'album. Les morceaux du milieu de l'album que sont « Feeding the Death Machine » et « Create Art, Through the World May Perish » ralentissent quelque peu le tempo et distille un peu plus de passages mélodiques dans ses compositions, le refrain de « Create Art, Through the World May Perish » en est un bon exemple.
Une des grandes forces d'Anaal Nathrakh est V.I.T.R.I.O.L. En effet, il maîtrise à merveille un large panel de chant et réussi à être très créatif sur ses placements de voix. La diversité de ses capacités vocales permettent de donner un côté opératique au groupe et d'appuyer à merveille les idées dépeintes dans le peu de paroles que l'on peut comprendre pendant l'écoute ou simplement trouver sur Internet. Ce côté opéra, permet au groupe de se différencier d'autres formations faisant du Black/Grind comme Fuckpig par exemple, qui va plus faire ressortir le côté punk et primitif de ce sous genre alors qu'Anaal Nathrakh va beaucoup plus privilégier des morceaux alambiqués, surprenants et s'appuyant sur une production léchée, moderne et tout en puissance.
Bien qu'avoir beaucoup aimé cet album, il y a certains points qui me dérange un peu... En effet, depuis quelques albums déjà Anaal Nathrakh est en pilote automatique total et sort des albums se ressemblant beaucoup, ce qui d'un côté normal et quelque peu compréhensif mais qui de l'autre casse l'identité d'un album. Comme tout ce ressemble quasiment, impossible de savoir de quel album sont tirés tel ou tel morceaux. Aussi, pour « Endarkment », la véritable pochette révélée, la tête de cochon avec un pénis dans chaque œil n'est pas de très bon goût... je trouve que cela fait très « adolescent » et décrédibilise pas mal le propos des anglais. Cela ne fait qu'apporter une shock value supplémentaire qui n'est, de un, pas très choquante, et de deux, qui n'apporte rien à l'ambiance musicale dépeinte dans « Endarkment ».... alors qu'avec les albums précédents, les pochettes du groupe arrivaient toujours à bien retranscrire les propos du groupe, là non... dommage.
Au final, ce « Endarkment » est une très belle surprise. En effet, ayant lâché le groupe depuis quelques albums et dont « A New Kind of Horror » m'avait convaincu que j'avais fais le tour du groupe, les anglais reviennent en force avec un album beaucoup plus sur le versant Black Metal de sa musique et de fait nous propose un album riche dans ses compositions et aux ambiances toujours aussi suffocantes et noires.