«« Shortcuts To Dead Ends », un premier album à travers lequel Haunted By Silhouettes nous offre une mise à nu de son univers, dans toute sa beauté, sa richesse et sa distinction»
La Norvège est décidément un pays où le Metal sait se renouveler, et c'est ce que vient nous prouver Haunted By Silhouettes, un groupe originaire de Trondheim. Avec deux EPs à son actif, il ne manquait qu'un premier album à ce jeune groupe de Melodic Death Metal pour se lancer dans la cour des grands, et c'est chose faîte avec « Shortcuts To Dead Ends ».
Avec « Exhumer », Haunted By Silhouettes nous plonge immédiatement dans une atmosphère lourde et pesante avec la simple mélodie d'un piano qui évoque une ombre s'avançant vers nous. Comme pour confirmer ce sentiment, une rythmique émerge lentement avant que tout le groupe, et un scream assez puissant, ne viennent rugir à nos oreilles. Si la ligne rythmique n'est pas démentielle, la composition instrumentale est plutôt bien pensée et très mélodique. « Vindicta » nous propose une rythmique bien plus entraînante et martelée. Quelques secondes devraient suffire à vous convaincre de headbanguer. Le scream, doublé cette fois, sonne de manière plus malsaine ce qui donne un autre relief au Death mélodique que le groupe nous propose, plutôt avec succès. De multiples influences se ressentent mais le mélange est équilibré et on ne s'ennuie pas. Haunted By Silhouettes semble décidément être une belle découverte, pleine de promesses. Le contraste entre la voix gutturale et la rythmique endiablée de « Shadowless » est réellement de toute beauté et on se laisse emporter, presque avec plaisir, dans le tourbillon infernal auquel nous invite le groupe. On flirte avec le Metalcore, dans la ligne rythmique et dans la technique de scream mais cette touche d'originalité n'est pas pour me déplaire ! On trouve autant d'Insomnium que d'In Flames dans la surprenante « Only You Know », construite autour d'une alternance de passages très doux avec une voix murmurante, et de moments agressifs mais toujours mélancoliques. L'accent est ici mis sur l'émotion de la chanson et je dois avouer que le groupe est très convaincant dans l'exercice auquel il se livre. Les presque six minutes de cette chanson permettent au groupe une grande liberté dans le développement musical.
Le rythme s'accélère et la tension monte d'un cran avec « A Plea For Silence », l'occasion de rappeler que proposer des morceaux extrêmement mélodiques n'empêche pas de les doter d'une belle force de frappe ! Après un passage où on devinerait presque une série de break, Haunted By Silhouettes nous ramène vers un riff de guitare plutôt doux et mélodieux qui répond parfaitement à la basse et à la voix, plus agressives. On revient vers quelque chose de plus old school et brutal avec « The Age Of Narciss », un morceau qui met à l'honneur des screams graves qu'on n'a pas entendu jusque là et dont la diction presque parlée rend très percutants. La guitare entêtante semble coller de son mieux à la ligne rythmique, ne s'accordant que de rares envolées et c'est finalement une impression de pesanteur que nous donne ce titre. Sur « Ubasute », la basse est enfin réellement mise en avant. Le batteur met toute son énergie dans la ligne rythmique à laquelle il donne beaucoup de puissance, parfois suivi par la guitare, parfois en support de l'ensemble mélodique qui s'y superpose. Amateurs de violence, vous ne pourrez pas résister à cette petite bombe musicale ! Un merveilleux break, que je n'osais espérer, vient même renforcer la lourdeur de ce titre.
« Iskalde Blikk » nous renvoie dans la froideur d'une nuit sans fin avec une mélodie si propre qu'elle en paraît distante. Après avoir fait preuve à plusieurs reprises de son talent, le groupe prend définitivement son envol avec une chanson majestueuse et qui témoigne de leur maîtrise ; ne vous privez surtout pas d'aller l'écouter ! On continue sur cette belle lancée avec « Fanning The Flame », sur un ton résolument plus Metalcore. La diction presque rapée mais aussi la ligne rythmique ne peuvent que vous faire sauter sur place. Encore une fois, Haunted By Silhouettes surprend mais toutes leurs expérimentations sont couronnées de succès et il est évident qu'ils ne font rien sans y réfléchir, ce qui leur permet de proposer des morceaux d'une grande qualité. Un petit passage parlé nous rapproche de groupe qui jouent parfois avec des références DSBM (Depressive Suicidal Black Metal) ou Doom comme Saturnus pour ne citer qu'eux. « The Clearing » donne plutôt l'impression d'être une lente escalade, ponctuée de riffs de guitare et de screams, qui nous mène à un sommet qu'on ne pouvait distinguer depuis la base. A chaque mesure, l'âme de la chanson se dévoile davantage et nous convainc un peu plus que le groupe a vraiment quelque chose à dire et ne se contente pas de bien jouer. La délicatesse est finalement le maître-mot pour qualifier ce que les Norvégiens proposent car tout se fait avec contrôle, donnant une dimension aérienne à l'album. Celui-ci s'achève d'ailleurs par une outro qui invite à l'apaisement et à la contemplation : « Into The Abyss », portée par une guitare lead de toute beauté.
Haunted To Silhouettes réussit le difficile pari de nous présenter un premier album qui frôle la perfection. Plus qu'un hommage au Melodic Death Metal, le groupe nous propose une mise à nu de son univers, dans toute sa richesse et sa distinction.